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Page:Carraud - Les métamorphoses d’une goutte d’eau, 1865.pdf/129

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LES AVENTURES

une juste idée de la demeure qu’elles avaient pu se construire dans ce tronc d’arbre, je me hasardai, suivie de mon élève, au seuil de cette habitation quand tout le monde en fut sorti. Je tombai dans une profonde admiration à la vue de cet édifice d’une hauteur prodigieuse, composé d’étages sans nombre, travaillés dans le bois avec un art qui dépassait de beaucoup celui que nous mettons dans nos constructions, qui nous semblent pourtant si parfaites. C’était un véritable palais finement découpé dans le cœur du chêne, et dont les colonnes ainsi que les parois étaient aussi noires que les ouvrières qui les avaient fouillées. Le plancher de ces loges, inégalement creusé, contenait des amas d’œufs, de larves et de nymphes, convenablement disposés. Après avoir admiré toutes ces choses, j’eus un mouvement d’orgueil en pensant que j’appartenais à cette grande famille d’insectes laborieux et intelligents, capables d’exécuter de pareils travaux. Enfin, nous quittâmes ces lieux pour continuer notre voyage.

Après mille vicissitudes qui nous firent sentir combien la fourmi isolée et privée du concours de ses sœurs est peu de chose, nous sortîmes du bois justement en face d’une de ces énormes fourmilières dont les habitants se livrent de si rudes batailles. Son dôme immense était couvert de fourmis qui semblaient se battre entre elles ; ne pouvant