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Page:Castor - Le pays, le parti et le grand homme, 1882.djvu/5

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RÉCITATIF.


I


Il y a quatre ans…

Il y a quatre ans ! notre homme était déjà en pleine éclosion, plus qu’à mi-chemin sur la route d’Ottawa !

Il faut donc remonter plus haut.

Nous pourrions raconter que dés le berceau on l’endormait souvent au chant populaire de :

« Byton, c’est une jolie place, etc., etc., etc. »

Mais ce serait empiéter sur le domaine du panégyriste et transporter dans la politique des faits qui n’appartiennent qu’à l’histoire.

Bornons-nous donc à la période de sa vie publique proprement dite.


II


Il y a vingt ans donc, M. Chapleau montait sur les tréteaux de la politique. Grâce à la souplesse de son caractère et à son talent de beau diseur, les succès ne se firent pas attendre. Sa bonne étoile le conduisit de suite dans de gras pâturages : il ne travailla guère, d’abord, que pour des ministres ou des millionnaires. Ayant aidé notablement l’entrée en parlement de certains hommes dont le principal titre à la confiance du pays était d’être tout cousus d’or, il en fit habilement ses obligés.

Ce fut le commencement de sa fortune.

Dès le début, la politique le pensionna, fournit abondamment sa garde-robe, même enfla joliment son pocket-money.

Encore saturé de l’enseignement collégial, il ne parlait alors que principes et agissait assez comme il parlait. C’était un conservateur catholique convaincu.

Mais une fortune trop hâtive, sans lui tourner tout à fait la tête, lui troubla le cœur.

« Pourquoi m’attarderais-je à porter le poids du jour, comme le plus prosaïque des stagiaires, » se serait-il dit ? « La politique donne ! Au diable la procédure ! et que je me la coule douce ! »

Il avait assez raison. Passer sa vie à lutter en cour de police contre l’influence monopolisatrice de son compétiteur M. Euclide Roy, ce n’était pas gai !