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Page:Cellini, Oeuvres completes, trad leclanché, 1847.djvu/119

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Je voulais retourner à Rome ; mais les sollicitations de mon frère et de ma sœur me forcèrent à m’arrêter à Florence. Piero Landi, cet excellent ami, qui déjà, comme je l’ai dit, m’avait rendu de si grands services, me conseilla aussi de rester quelque temps à Florence. Il pensait que je devais attendre pour voir un peu ce qui se passerait après le bannissement des Médicis, c’est-à-dire d’Hippolyte et d’Alexandre, dont l’un devint plus tard cardinal, et l’autre duc de Florence. Je me mis donc à travailler dans le Mercato-Vecchio, où je gagnai beaucoup d’argent en montant des joyaux.

À cette époque, arriva à Florence un Siennois, nommé Girolamo Marretti, qui avait longtemps demeuré en Turquie ; c’était un homme d’un esprit distingué. Il vint à ma boutique, et me commanda une de ces médailles d’or que l’on portait sur le chapeau. Il voulut que j’y représentasse Hercule déchirant la gueule du lion[1]. Pendant que je travaillais à cette médaille, Michel-Ange Buonarroti vint la voir plusieurs fois. J’y avais apporté une énorme application. L’attitude de la figure, la pose hardie de l’animal, qui ne ressemblait à rien de ce que l’on avait imaginé jusqu’alors, et peut-être aussi la nouveauté de ce genre de travail qui était complétement inconnu au divin Michel-Ange, firent qu’il me donna tant d’éloges, que mon ardeur s’en accrut à un point incroyable. Mais bientôt je n’eus plus que des joyaux à monter ; malgré le bénéfice que j’y trouvais, j’étais donc loin d’être content, car je cherchais des ouvrages où il fallût déployer plus de talent.

Sur ces entrefaites, Federigo Ginori, jeune homme d’un esprit éminent, à qui sa beauté et sa grâce valurent une intrigue avec une princesse à Naples, où il séjourna plu-

  1. Cellini, dans le chapitre V de son Traité d’Orfèvrerie, donne une description détaillée de cette médaille.