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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/158

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Si quelques beaux bergers apportent une fleur,
Je vois qu’en me l’offrant ils regardent ma sœur.
S’ils vantent les attraits dont brille mon visage,
Ils disent à ma sœur : « C’est ta vivante image. »
Ah ! pourquoi n’ai-je encor vu que douze moissons ?
Nul amant ne me flatte en ses douces chansons ;
Nul ne dit qu’il mourra si je suis infidèle.
Mais j’attends. L’âge vient. Je sais que je suis belle
Je sais qu’on ne voit point d’attraits plus désirés
Qu’un visage arrondi, de longs cheveux dorés,
Dans une bouche étroite un double rang d’ivoire,
Et sur de beaux yeux bleus une paupière noire.



XI[1]

HYLAS


Le navire éloquent, fils des bois du Pénée,
Qui portait à Colchos la Grèce fortunée.
Craignant près de l’Euxin les menaces du Nord,
S’arrête, et se confie au doux calme d’un port.
Aux regards des héros le rivage est tranquille ;
Ils descendent. Hylas prend un vase d’argile,
Et va, pour leurs banquets sur l’herbe préparés,
Chercher une onde pure en ces bords ignorés.
Reines, au sein d’un bois, d’une source prochaine,
Trois naïades l’ont vu s’avancer dans la plaine.

  1. Édition 1819. Le manuscrit ne porte pas de titre. Il commence par trois vers que l’auteur avait en partie effacés.