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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/225

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LXIV[1]


— Tu le sais ? et quel dieu, par tes présents séduit,
Pour toi de l’avenir a dissipé la nuit ?
Est-ce Delphe ou Claros ? tes yeux l’ont-ils su lire
Dans le vol des oiseaux qu’Apollon même inspire ?
Ou le vaisseau parleur qui chercha la toison
A-t-il été pour toi ce qu’il fut pour Jason ?


LXX[2]

MYSIS


Mysis (enfant)… « Lycas, donne-moi des fruits… — Je n’en ai point… laisse-moi aller, je suis pressé… — Oh ! oui, je sais bien où tu vas. Tu vas trouver Chloé… — Chloé ? — Oui, je te vois tous les jours avec elle… Je sais bien que tu l’aimes… moi, je l’aime aussi… — Toi aussi ?… — Oui, elle me donne des fruits… Hier, elle était à se promener à tel endroit (site), elle me vit passer et me demanda si je voulais des amandes. Je tendis mes deux mains et je lui dis : Chloé, je t’aime. Elle sourit, m’en donna davantage, et, promenant sa main autour de mon visage, me dit : … Enfant, sais-tu déjà ce que c’est que d’aimer ? puis elle me leva dans ses bras et me donna plusieurs baisers… — Dieux ! elle t’a baisé !… — Sans doute. — Oh ! je voudrais être à ton âge, je serais toujours avec elle comme toi… — Elle m’offrirait des amandes et des caresses… au lieu qu’elle ne m’offre rien et ne me baise pas !… — Puis m’en

  1. Éd. G. de Chénier.
  2. Édition G. de Chénier. Le titre n'est pas de la main de l'auteur.