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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/240

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Alors il dira :

« Heureux mille fois celui qui épousera les filles de Dryas ; car nulles déesses plus belles ne foulent aux pieds le haut Olympe. »

Le vers 38 et les trois suivants[1] sont d’une beauté inexprimable. Je ne crois pas qu’aucun poète puisse en offrir quatre autres plus touchants, plus pathétiques, plus remplis de mélancolie et de larmes. Il n’y a rien de pareil dans l’imitation de Virgile. On trouve dans l’Énéide : Silent laté loca, qui a quelque rapport avec l’expression de Théocrite. La répétition qu’il en fait est au-dessus de l’éloge. Voici comment je viens d’essayer de rendre ces vers divins :


La mer en ce moment se tait ; les vents se taisent.
Mais l’amour, mais, ô dieux ! la honte, la douleur,
Ne se taisent jamais dans le fond de mon cœur !
Je brûle, je l’adore, hélas ! quand sa promesse
(Le parjure !) a séduit, a trompé ma faiblesse !

Voici les quatre vers traduits :

ἠνίδε σιγῇ μὲν πόντος, σιγῶντι δ’ ἀῆται·
δ’ ἐμὰ οὐ σιγῇ στέρνων ἔντοσθεν ἀνία.
ἀλλ’ ἐπὶ τήνῳ πᾶσα καταίθομαι, ὅς με τάλαιναν
ἀντὶ γυναικὸς ἔθηκε κακὰν καὶ ἀπάρθενον ἦμεν.

  1. De la deuxième idylle de Théocrite.