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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/282

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Elle aime, elle est constante, elle ne ment jamais ;
Là, tout choix est heureux, toute ardeur mutuelle,
Et tout plaisir durable, et tout serment fidèle.
Que dis-je ? on aime alors sans trouble ; et les amants,
Ignorant le parjure, ignorent les serments.

Venez me consoler, aimables héroïnes.
Ô Léthé ! fais-moi voir leurs retraites divines ;
Viens me verser la paix et l’oubli de mes maux.
Ensevelis au fond de tes dormantes eaux
Le nom de Lycoris, ma douleur, mes outrages.
Un jour peut-être aussi, sous tes riants bocages,
Lycoris, quand ses yeux ne verront plus le jour,
Reviendra tout en pleurs demander mon amour ;
Me dire que le Styx me la rend plus sincère,
Qu’à moi seul désormais elle aura soin de plaire ;
Que cent fois, rappelant notre antique lien,
Elle a vu que son cœur avait besoin du mien.
Lycoris à mes yeux ne sera plus charmante :
Pourtant… Ô Lycoris ! ô trop funeste amante !
Si tu l’avais voulu, Gallus, plein de sa foi,
Avec toi voulait vivre et mourir avec toi.


XVI[1]


 
Ô jours de mon printemps, jours couronnés de rose,
À votre fuite en vain un long regret s’oppose.
Beaux jours, quoique, souvent obscurcis de mes pleurs,

  1. Éditions 1819.