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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/324

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Ou mille autres ennuis. Car, hélas ! nul mortel
Ne vit exempt de maux sous la voûte du ciel.
Oh ! quel présent funeste eut l’époux de l’Aurore,
De vieillir chaque jour, et de vieillir encore,
Sans espoir d’échapper à l’immortalité !
Jeune, son front plaisait. Mais quoi ! toute beauté
Se flétrit sous les doigts de l’aride vieillesse.
Sur le front du vieillard habite la tristesse ;
Il se tourmente, il pleure, il veut que vous pleuriez :
Ses yeux par un beau jour ne sont plus égayés.
L’ombre épaisse et touffue et les prés et Zéphire
Ne lui disent plus rien, ne le font plus sourire.
La troupe des enfants, en l’écoutant venir,
Le fuit, comme ennemi de leur jeune plaisir ;
Et s’il aime, en tous lieux sa faiblesse exposée
Sert aux jeunes beautés de fable et de risée.


XXXII[1]

À LE BRUN


Qu’un autre soit jaloux d’illustrer sa mémoire ;
Moi, j’ai besoin d’aimer ; qu’ai-je besoin de gloire,
S’il faut, pour obtenir ses regards complaisants,
À l’ennui de l’étude immoler mes beaux ans ;
S’il faut toujours errant, sans lien., sans maîtresse,

  1. Édition 1819. Le titre a été ajouté par les éditeurs. On trouvera l’épître de Le Brun à laquelle André Chénier répond, dans l’Appendice, à la fin du tome second des poésies.