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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/58

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avoir consacré : ou a parlé de trois portefeuilles, dans lesquels il aurait classé ses diverses œuvres par ordre de progrès et d’achévement : les deux premiers de ces portefeuilles se seraient perdus, et nous ne posséderions que le dernier, le plus misérable, duquel pourtant ou aurait tiré toutes ces belles choses. J’ai toujours eu peine à me figurer cela. L’examen des manuscrits restants m’a rendu cette supposition de plus en plus difficile à concevoir. Je trouve, en effet, sans sortir du résidu que nous possédons, les diverses manières des trois prétendus portefeuilles : par exemple, l’idylle intitulée la Liberté s’y trouve d’abord dans un simple canevas de prose, puis en vers, avec la date précise du jour et de l’heure où elle fut commencée et achevée. La préface que le poète aurait esquissée pour le portefeuille perdu, et qui a été introduite pour la première fois dans l’édition de 1833 (tome I, page 23), prouverait au plus un projet de choix et de copie au net, comme en méditent tous les auteurs. Bref, je me borne à dire, sur les trois portefeuilles, que je ne les ai jamais bien conçus : qu’aujourd’hui que j’ai vu l’unique, c’est moins que jamais mon impression de croire aux autres, et que j’ai en cela pour garant l’opinion formelle de M. G. de Chénier, dépositaire des traditions de famille, et témoin des premiers dépouillements. Je tiens de lui une note détaillée sur ce point ; mais je ne pose que l’essentiel, très-peu jaloux de contredire. André Chénier voulait ressusciter la Grèce ; pourtant il ne faudrait pas autour de lui, comme autour d’un manuscrit grec retrouvé au xvie siècle, venir allumer, entre amis, des