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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/69

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les législateurs eux-mêmes dans l’œuvre des nouveaux Établissements politiques. De tous côtés on s’accuse de conspirations, de complots, sans voir qu’à la fin il y a danger « que notre inquiétude errante et nos soupçons indéterminés, dit-il, ne nous jettent dans un de ces combats de nuit où l’on frappe amis et ennemis. » C’est cette confusion de rumeurs et ce nuage gros d’alarmes qu’André Chénier a surtout à cœur d’éclaircir et de démêler. Les vrais, les principaux ennemis de la Révolution, il se le demande, où sont-ils ?

Les ennemis du dehors, il les réduit à ce qu’ils sont, il ne les méconnaît pas, mais il ne se les exagère pas ; les émigrés de même. Dans tous les cas, si l’on a des ennemis au dehors, si l’on en a aussi au dedans, il faut de l’union pour les combattre et en triompher, et ce qui s’oppose le plus à cette union, c’est ce malheureux penchant aux soupçons, au tumulte, aux insurrections, qui est fomenté en France, et qui l’est surtout par une foule d’orateurs et d’écrivains : « Tout ce qui s’est fait de bien et de mal dans cette Révolution est dû à des écrits », dit André Chénier ; et il s’en prend hardiment à ceux qui sont les auteurs du mal, à « : ces hommes qui fatiguent sans cesse l’esprit public, qui le font flotter d’opinions vagues en opinions vagues, d’excès en excès, sans lui donner le temps de s’affermir, qui usent et épuisent l’enthousiasme national contre des fantômes, au point qu’il n’aura peut-être plus de force s’il se présente un véritable combat. » Il se fait leur dénonciateur déclaré et commence contre eux sa guerre à mort ;