Aller au contenu

Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/276

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous trouvons dans Opéra et Drame des paroles qui sont, apparemment, des fragments d’autobiographie. Après avoir signalé comment notre langage parlé, de plus en plus conventionnel, semble se vider toujours davantage de ce contenu qui en appelle au sentiment, le maître continue : « Dans le langage parlé, nous ne pouvons nous exprimer de manière à rendre ce que notre émotion a d’intime, car il nous est impossible d’inventer, en nous servant de cet instrument, sans forfaire à notre émotion ; nos sentiments, accessibles par lui à la seule intelligence, demeurent incommunicables au sentiment d’autrui, qui seul saurait les partager. Ce fut donc pour de bonnes raisons, que, fuyant le langage de l’intelligence, le sentiment vint se réfugier dans le langage des sons, notre musique actuelle. » La musique est « le langage nouveau, libérateur et formateur, le seul dans lequel le poète puisse rendre manifeste et convaincant le contenu le plus profond de son émotion ». Donc, pour Wagner, la musique est un « langage nouveau » ; et il se jeta sur lui avec la même ardeur et le même succès qu’alors qu’il s’agissait du latin et du grec. Famille et maîtres secouèrent la tête, tenant le jeune homme pour inconstant ; mais lui, plein d’une violente obstination, suivit la route que lui montrait « un instinct infaillible. »

Pendant quelque temps, Wagner médita et composa en secret toutes sortes de choses. Son essai le plus intéressant fut une pastorale, pour laquelle il ne fit d’avance « point de projet ou de poème, mais écrivit en même temps la musique et les vers, faisant ainsi sortir les situations complètes, simultanément, de la musique et des vers ». Mais ce fut alors qu’il éprouva la nécessité de se livrer à des études régulières et complètes ; il le fit avec le plus grand succès et son pro-