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JEAN TALON, INTENDANT

On rencontre parfois dans les plumitifs du Conseil des arrêts qui offrent un intérêt tout particulier. Au mois de juillet 1667, Laurent Benoist, de l’île d’Orléans, présente une requête dans laquelle il expose qu’ayant « été en guerre sur les neiges », avec M. de Courcelle, contre les Iroquois, il fut blessé et réduit à demeurer chez les Hollandais pour se faire soigner ; qu’il n’est pas encore parfaitement guéri ; qu’ayant demeuré quinze ou seize mois à Corlaer, à son retour il a trouvé sa terre en bien mauvais ordre[1] et se voit dans l’impuissance de la faire valoir ; qu’en même temps il est persécuté par des créanciers envers qui il était endetté avant cette expédition, et qui menacent de le poursuivre et « de le consommer en frais ». Il demande donc qu’il lui soit accordé une année de délai pour les payer. Le Conseil s’empresse d’accorder à ce héros obscur et malheureux le répit sollicité, et fait défense à tous huissiers et sergents d’attenter à sa personne, à ses biens et à ceux de ses cautions, à peine de nullité et cassations de toutes procédures, et de tous dépens, dommages et intérêts[2].

Tous les cas n’étaient pas également favorables. Vers le même temps, Marguerite Lebeuf, femme de Gabriel Lemieux, tonnelier, demandait, comme Benoist, un répit pour payer ses créanciers. Le conseil ordonna que ceux-ci seraient appelés afin que la question fût décidée contradictoirement. Et en attendant il défendit à ces derniers de la poursuivre. Mais, quelques jours plus tard, un nommé Jean Frouin, envers qui était endettée la dite LeBeuf, poursuivi par ses propres créanciers, exposa au conseil qu’il était incapable de les payer parce

  1. — Dans le texte : « remplie de fredoches ».
  2. Jugements du Conseil Souverain, I, p. 433.