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Page:Chapais - Jean Talon, intendant de la Nouvelle-France (1665-1672), 1904.djvu/89

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JEAN TALON, INTENDANT

demanda la Mère Supérieure sans dire qui il était, elle vint avec la Mère Marie de la Nativité, il les salua de la part de M. l’Intendant, feignant d’être son valet de chambre, et les assura que monsieur Talon était très disposé à leur faire tout le bien qui dépendrait de lui ; comme il parlait admirablement bien, et qu’il assurait fort hardiment tout ce qu’il disait, la Mère de la Nativité qui avait beaucoup de discernement, fit un signe à la Mère Supérieure, et elle lui dit agréablement qu’elle ne pensait pas se tromper en le croyant plus qu’il ne voulait paraître ; il lui demanda ce qu’elle voyait en lui qui lui donnait cette pensée, elle lui répondit qu’il y avait dans son discours et dans sa physionomie quelque chose qui l’assurait que c’était M. l’Intendant lui-même à qui elle avait l’honneur de parler ; il ne pût dissimuler plus longtemps la vérité, ni cacher le plaisir que lui faisait un compliment si juste et si obligeant, et conçut pour notre Communauté et en particulier pour la Mère de la Nativité une estime et une affection dont nous avons ressenti les effets dans la suite »[1].

À ce moment où l’intendant Talon vient d’arriver au siège du gouvernement dont il va être le plus efficace administrateur, il n’est pas hors de propos de nous demander ce que c’était que la ville de Québec en 1665.

  1. Histoire de l’Hôtel-Dieu, p. 176. — À propos de la Mère de la Nativité on lit dans le même ouvrage : « Elle joignait à ses rares vertus un esprit gai et agréable, une conversation charmante, ayant une facilité admirable pour s’énoncer et pour écrire en prose ou en vers. M. Talon, intendant, qui se mêlait de poésie, lui adressait quelquefois des madrigaux ou épigrammes auxquelles elle répondait sur le champ fort spirituellement en même style, et ses pièces étaient estimées de tous les connaisseurs. »