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Page:Charles Blanc-Grammaire des arts du dessin, (1889).djvu/77

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LIVRE PREMIER

ARCHITECTURE



I


L’ARCHITECTURE EST L’ART DE CONSTRUIRE SELON LES PRINCIPES DU BEAU.

Dans tout véritable architecte il y a deux hommes, un artiste et un constructeur. Ces deux hommes sont réunis en un seul et ils doivent l’être, l’un pratiquant ce que l’autre a conçu, et tous les deux se concertant pour mettre l’utile à l’unisson du beau. Mais ce qui, dans l’architecture, concerne la science, doit être pour nous nettement distingué de ce qui est l’art.

Comme constructeur, l’architecte s’occupe du nécessaire et du commode : il éprouve les matériaux, il en calcule la résistance et la pesanteur, il en détermine la coupe, et il dispose ses édifices de façon à les rendre à la fois solides et convenables, s’ils ont une destination, solides alors même qu’ils n’en ont aucune, c’est-à-dire quand ils doivent être purement symboliques. Comme artiste, l’architecte invente les combinaisons de lignes et de surfaces, de pleins et de vides, qui devront éveiller dans l’âme du spectateur des impressions d’étonnement ou de majesté, de terreur ou de plaisir, de puissance ou de grâce. Ainsi, avant que la science soit soumise en lui à toute la rigueur des mathématiques, son art, échappant aux lois de l’utile et à l’empire du nécessaire, s’élève à des conceptions que le sentiment seul devra juger, et il n’obéit encore qu’à ces grandes règles déjà tracées par le génie des autres ou que découvre son propre génie, et qui sont supérieures au calcul.