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Page:Charles Blanc-Grammaire des arts du dessin, (1889).djvu/98

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GRAMMAIRE DES ARTS DU DESSIN.

les siècles ; leurs temples mêmes avaient une solennité sépulcrale, et leurs statues, rigides comme des momies, semblaient faites pour perpétuer cette image de la mort, qui, sans les épouvanter, était toujours présente à leur esprit. Un peuple ainsi préoccupé de la vie future et qui l’espérait immuable, un peuple qui a conservé des cadavres plus de six mille ans, devait développer dans son architecture la dimension qui assure la solidité de l’édifice et en présage la durée sans fin. L’immense largeur des bases devait être le trait caractéristique de ses monuments. Murs, piliers, colonnes, tout, en effet, dans la construction égyptienne, est robuste, épais et court. Et, comme pour ajouter à l’évidence de cette inébranlable solidité, la largeur des bases est augmentée encore par une inclinaison en talus qui donne à toute l’architecture une tendance pyramidale.


prédominance de la dimension en largeur.

(Temple égyptien.)


Les Pyramides elles-mêmes, celles de Memphis, dont la plus grande est le bâtiment le plus élevé de la terre, sont assises sur une base énorme : elles sont beaucoup moins hautes que larges. La pyramide de Chéops, par exemple, a 232 mètres 83 centim. à la base primitive, quand la hauteur verticale n’est que de 146 mètres 52 centim., c’est-à-dire que la base est à la hauteur exactement comme 8 est à 5. Ainsi tous les monuments égyptiens, même ceux dont l’élévation est célèbre, sont cependant plus étonnants encore par l’étendue de leur dimension en largeur, dimension qui les rend et les fait paraître impérissables, éternels.

Tout autre est l’aspect de nos monuments dans l’architecture ogivale. Ils s’élèvent, ils s’élancent vers le ciel, et c’est la hauteur ici qui triomphe. La foi du moyen âge a soulevé la voûte romaine : le souffle de l’esprit a