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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

autres villes un système d’inspecteurs (au nombre de 72) qu’ils appelèrent « Darouk-hatchi ». Tous ont été, ce me semble, mis à mort par le peuple de Kaoli. Les Mongols envoyèrent alors une armée contre le Kaoli, et, prenant chaque cité l’une après l’autre, rétablirent l’ordre et la paix. Depuis 1264 jusqu’à 1294, les habitants du pays tout entier furent incorporés sous les bannières mongoles. »

Il ne semble pas douteux que les habitants de Tchae-Tchiou soient les descendants des Mongols qui, comme le prouvent les relations chinoises, s’installèrent dans l’île, il y a six cents ans, et y établirent, outre des garnisons, les jetées qui ont gardé l’empreinte du temps comme du génie de ceux qui les ont construites et qui attestent aussi des sentiments guerriers. J’ai su que des livres et des manuscrits existaient dans l’île, mais malgré toutes les ruses que j’ai employées pour m’en procurer, je n’ai pu réussir à en obtenir même un seul. Cela ne semblera pas, du reste, étrange au voyageur qui a vécu en Corée, car, à Séoul, aussi bien qu’à Tchou-Song, c’est un vrai travail d’Hercule que d’arriver à jeter un coup d’œil sur un volume relatif au passé de la Corée : on regarde presque comme un crime de parler des actions des morts, vénération qui va même jusqu’à éviter, autant que possible, de mentionner le nom des rois.

Durant mon séjour à Tchae-Tchiou, je demandai fréquemment des renseignements sur Hamel. Mais tout souvenir de sa visite s’est évanoui avec la génération qui l’a vu. Un vieillard de quatre-vingts ans me dit que, quand il était encore enfant, un bateau s’était échoué sur la côte, mais que les passagers n’avaient pas été autorisés à rester dans l’île et avaient été renvoyés immédiatement sur le continent.

Je m’étais laissé dire que les Portugais s’étaient jadis établis à Quelpaërt. Cette assertion semble n’avoir pas le moindre fondement, si l’on en juge par le teint et le type des habitants qui ont l’air absolument mongol et tartare.

Le 2 octobre, me trouvant toujours dans l’impossibilité de débarquer mes hommes, même après la visite que j’avais faite à la capitale, et tenu sous une stricte surveillance, je résolus de me retirer. Un changement de vent nécessaire, et nous n’attendions pas autre chose.

Je passai la journée sur le quai à faire des photographies, recevant des