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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

J’avais souvent entendu parler du monastère de Sok-Oang-Sa (monastère du Rêve du roi), situé dans le nord-est de la Corée, au milieu des montagnes de Sol-Pong, dans la province d’An-Pien, comme d’un endroit vénéré des Coréens et, selon une vieille légende, érigé après le rêve du roi Tadjo. Le renom de Sok-Oang-Sa lui a mérité une mention dans les Annales chinoises. « Les nobles, les fonctionnaires et hommes de haut rang se rendaient souvent à Sok-Oang-Sa pour écouter les récits des bonzes qui enseignaient, en même temps, les classiques et la philosophie. » De retour de mon expédition à l’île de Quelpaërt, j’ai gagné Vladivostok, la capitale de la Sibérie nord-est, par bateau à vapeur, et descendant la côte, débarqué à Guensan, je me suis mis à traverser cette partie de la Corée à pied accompagné d’un mappo ou conducteur coolie et de deux poneys qui me servaient comme chevaux de bât, avec l’intention de gagner la capitale par cette route difficile et peu connue. Je profitai de cette occasion, en faisant un détour, pour faire visite au célèbre monastère. M. Wo, le consul chinois à Guensan, qui, par parenthèse, était un diplômé du Collège de Harvard, aux État-Unis, eut la complaisance de me donner une chaude lettre de recommandation pour le bonze chef du monastère, M. Sui-Ho (rivière neigeuse).

C’était au coucher du soleil du 29 octobre 1888, que, fatigué de la route, longue de 27 milles, parcourue depuis Guensan, accompagné de mon coolie, j’arrivai au pied de la montagne de Sol-Pong, et, entrant dans la gorge indiquée par mon guide, je me trouvai sur la route qui menait directement au monastère.

Au fur et à mesure que nous avancions, la beauté de l’endroit se développait. Nous passâmes au travers de superbes forêts de sapins, lesquels dégageaient de doux parfums. Au milieu de ces forêts, venait, des hauteurs un ruisseau qui, tombant de rocher en rocher, formait des cascades dont le bruit semblait chanter joyeusement le bonheur et la douce solitude de l’endroit. Plus loin, nous traversâmes un pont pittoresque et, éclairés par les rougeurs du soleil couchant, nous nous arrêtâmes à la porte du monastère. Nous fûmes accueillis par de nombreux bonzes et je fus conduit dans une chambre qui me fut assignée. Ayant changé mes vêtements et accompli mes ablutions, je me mis, aidé de mon conducteur, à préparer