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Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/89

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besognait comme foudre en la bataille. Là, d’un pesant marteau, son arme unique, taillé en bec à un côté, rompait lances, brisait épieux, déchirait jazerans comme si les mailles eussent été drap. Et nul ne lui pouvait résister. Et ainsi effrayait-il l’ennemi, lequel se voyant venir sus ces noirs soudards, nombreux, hardis, délibérés, ullant et coassant, se cuidait mort davant le combat.

La déconfite parachevée et le gros du butin enlevé (ce dont Dirk avait part léonine et jamais ne faisait celle des pauvres), les barons et hommes d’armes le laissaient, lui et les siens, s’épandre par le champ et s’en allaient disant : Au Corbeau les miettes.

Nul n’y eût osé demourer, car il eût été détranché et occis incontinent. Et soudain commençaient ceux de Dirk besogner en corbeaux ; coupant les doigts pour avoir les bagues, voire même aux blessés, lesquels criaient encore à l’aide, détranchant tête et bras à fin de se donner plus d’aise au dévêtir. Eux-mêmes s’entrebattaient et tuaient sus les pauvres morts, pour gorgerins, courroie chétive de cuir bouilli ou chose moindre encore.

Et se tenaient aucunes fois au champ trois jours et trois nuits.

Quand étaient nus tout à fait les morts ils boutaient la dépouille ès chariots, pour ce emmenés.