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Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/94

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Et la sœur dit :

« Salut, mon bel aîné, quelles nouvelles apportez ? Tu fus vainqueur assurément, ainsi que je le vois à ta trogne triomphante. Où donc est l'écharpe des dames ? »

Et le frère dit :

« Comment est votre glorieux portement, Messire Siewert Halewyn l'aîné, descendant du Corbeau au fort bec. Car tel corbeau croque aigles, autours, laniers, gerfaux, éperviers, sans grande peine. Avez-vous point soif, soif de baron, soif de victorieux, je ne dis soif de manant ? Nous avons céans certain petit vin de grenouille, lequel vous rafraîchira les boyaux de tout feu de victoire. »

« Ha, » répondit le Sire grinçant des dents, « que Dieu me donne force, je te ferai chanter autre chanson, Messire mon frère. »

Et ce disant, tira son épée pour l'en férir, mais le puis-né, l'évitant, cria :

« Salut, corbeau décorbiasé ; salut, chapon. Exhausse notre maison, je te supplie, Siewert le victorieux. »

« Ha, » dit le Sire, « que n'allait donc ce piauleux tournoyer ainsi que moi ? mais il ne l’eut osé, étant de cette guenaille de couards qui regardent faire les autres, croisent les bras et se gaussent des besognants. »