Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/549

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qui, sous la forme de la propriété familiale et de l’égalité forcée du partage, chasse, pour ainsi dire, le droit absolu de la propriété individuelle.

Nous opposera-t-on que ces dispositions si vigoureuses du droit révolutionnaire ont été affaiblies depuis et atténuées ? Oui, elles l’ont été par le consulat, sous l’influence de Bonaparte, qui voulait rétablir le despotisme paternel comme contrefort du despotisme impérial, et constituer de nouveau en monarchie la famille, dont la révolution avait fait, dans l’ordre de la propriété, une république égalitaire. Mais quelles que soient les retouches que le consulat a fait subir au droit de la Révolution, celui-ci subsiste encore, malgré tout, dans le Code civil. La réaction consulaire l’a affaibli : elle n’a pu l’abolir. Et aujourd’hui même, dans la matière des successions, la propriété individuelle ne fonctionne pas.


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La Révolution, tout en déclarant qu’elle n’entendait pas toucher au droit sacré de propriété, se rendait bien compte que par ses lois successorales elle le limitait et le démembrait. Et pour s’y autoriser, elle formulait une théorie toute sociale de la propriété. Si celle-ci est un prolongement de la personne humaine, si elle procède de l'individu, de