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Page:Charrière - Caliste ou lettres écrites de Lausanne, 1845.djvu/12

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NOTICE.

comme Boileau en son temps faisait du Whal ou du Leck :

Wurts… Ah ! quel nom, grand Roi, quel Hector que ce Wuits !

Elle peint au naturel et avec enjouement la société hollandaise d’alors[1], comme eût fait une Française détachée de Paris et qui aurait noté à livre ouvert les ridicules et les pesanteurs : « Hier, nous jouîmes des plaisanteries d’un jeune Amsterdammois. » Et les demoiselles nobles à marier, elle oublie qu’elle l’est et qu’elle n’aura que peu de dot ; elle s’égaie en attendant :

« Faites, je vous prie, mes compliments à cette freule. Ne trouverait-elle point, comme madame Ruisch, que, pendant un temps si pluvieux, où l’on ne sait que faire, il faudrait, pour s’amuser, se marier un peu ? »

« Ce que vous dites du pouvoir de la dot et de l’inutilité de la parure, m’a fait rire, tout comme si je n’y avais point d’intérêt et comme si je n’avais rien de commun avec ces demoiselles qui perdent leurs peines et leur temps, sans s’attirer autre chose que de stériles douceurs. Ah ! laissez-nous ce plaisir, cette légère espérance pour consolation. Qui sait ? il y a des amants moins solides. »

« … Ah ! ma chère mère, n’y pensez plus. Regardez plutôt ma cousine (qui se mariait), son air, sa robe, ses pensées ; car je vous demanderai compte de tout cela. Il me semble qu’un volume entier de titres ne me ferait pas envier ce jour-ci ; il faut bien autre chose pour compenser ce qu’un engagement éternel a d’effrayant. Je souhaite que ma cousine sente cette autre chose, ou qu’elle ne sente point d’effroi. Je voudrais qu’elle fût bien gaie et qu’elle ne pleurât qu’un peu ; car elle pleurera ; cela est, dit-on, dans l’ordre. »

  1. D’alors, et, dans tout ce qui suit, je prie de remarquer que je n’entends parler avec madame de Charrière que du passé ; la société actuelle de La Haye est, m’assure-t-on, des plus désirables.