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Page:Charrière - Caliste ou lettres écrites de Lausanne, 1845.djvu/331

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cela même qu’il paraîtrait fort innocent de redire, et, malgré moi, je crois devoir m’attacher à la pensée que ce sont mes lettres lues qui ont fait le mal. Encore une fois je vous prie de voir M. de la R**. Vous en aimerez mieux votre vie quand vous verrez le bien qu’elle fait à la vie d’autrui… Oh Dieu ! quel odieux monde que celui-ci ! que de haines. de persécutions ! quelle hypocrisie avec ceux que l’on craint ! quelle lourde malveillance vis-à-vis de ceux qu’on peut écraser !

Adieu, je vais écrire deux mots à cet honnête homme, — Nous eûmes hier un bal de pressureurs et de vendangeuses où j’assistai de huit à neuf et de dix à minuit. J’eus le bonheur de plaire beaucoup à toute la compagnie, et il n’est bruit aujourd’hui que du plaisir qu’on a eu à me voir. J’ai causé, j’ai ri...

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_______Qu’il sera doux de vous revoir !
_______Chacun me voit, le jour, le soir,
_______Lire cent fois, par cœur apprendre
____L’écrit charmant qui m’en donne l’espoir.
_______Qu’il sera doux de vous revoir,
_______S’il est si doux de vous attendre !

Ces dons si précieux, que l’avare nature
N’a jamais accordés qu’avec poids et mesure,
Un flatteur les prodigue, et, les entassant tous,
Il charge son héros d’un esprit vif et doux,
Profond, et toutefois charmant avec les belles.
De ces portraits trop beaux quels que soient les modèles,
Je trouve, Benjamin, que l’on n’y peint que vous.
 
Du mot savoir par cœur, pour la première fois
_______Je vois le sens et l’origine.
_______L’enfant qui bâille ou se mutine
____Apprend par force, obéissant aux lois
_______Du dur pédant qui le chagrine ;
Mais on apprend par cœur ce qu’on apprend par choix.

2 décembre, attendant Benjamin Constant.
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