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Page:Charrière - Caliste ou lettres écrites de Lausanne, 1845.djvu/64

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LETTRES

arrangés par elle et par moi, lui donnent en se dérangeant un air de rudesse ; elle est trop rouge, et le lendemain elle a mal à la tête ou un saignement de nez ; mais elle aime la danse avec passion : elle est assez grande, bien faite, agile, elle a l’oreille parfaite ; l’empêcher de danser serait empêcher un daim de courir. Je viens de vous dire comment est ma fille pour la taille ; je vais vous dire ce qu’elle est pour le reste. Figurez-vous un joli front, un joli nez, des yeux noirs un peu enfoncés ou plutôt couverts, pas bien grands, mais brillants et doux ; les lèvres un peu grosses et très vermeilles, les dents saines, une belle peau de brune, le teint très animé, un cou qui grossit malgré tous les soins que je me donne, une gorge qui serait belle si elle était plus blanche, le pied et la main passables ; voilà Cécile. Si vous connaissiez madame R***, ou les belles paysannes du pays de Vaud, je pourrais vous en donner une idée plus juste. Voulez-vous savoir ce qu’annonce l’ensemble de cette figure ? Je vous dirai que c’est la santé, la bonté, la gaieté, la susceptibilité d’amour et d’amitié, la simplicité de cœur et la droiture d’esprit, et non l’extrême élégance, délicatesse, finesse, noblesse. C’est une belle et bonne fille que ma fille. Adieu, vous m’allez demander mille choses sur son compte, et pourquoi j’ai dit Pauvre Cécile ! que deviendra-t-elle ? Eh bien ! demandez ; j’ai besoin d’en parler et je n’ai personne ici à qui je puisse en parler.



DEUXIÈME LETTRE.


Eh bien, oui. Un joli jeune Savoyard habillé en fille. C’est assez cela. Mais n’oubliez pas, pour vous la figurer aussi jolie qu’elle l’est, une certaine transparence dans le