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Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t6.djvu/450

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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

« Madame de Chateaubriand demande la permission de mettre ses respects aux pieds de Madame. J’offre au ciel tous mes vœux pour la gloire et la prospérité de la mère de Henri V et je suis avec un profond respect,

« Madame,
« De Votre Altesse Royale le très-humble et
très-obéissant serviteur,
« Chateaubriand. »

« P.-S. Cette lettre attendait depuis un mois une occasion sûre pour parvenir à Madame. Aujourd’hui même j’apprends la mort de l’auguste aïeul de Henri[1]. Cette triste nouvelle apportera-t-elle

  1. Charles X mourut, à Goritz, le 6 novembre 1836, d’une attaque de choléra, dont il avait senti les premières atteintes deux jours auparavant, le 4 novembre, jour de la Saint-Charles. Le médecin avait demandé qu’on éloignât ses petits enfants, à cause des dangers de la maladie, mais le duc de Bordeaux déclara qu’aucune considération ne l’empêcherait de suivre le mouvement de son cœur, et Mademoiselle fit la même réponse que son frère. Le Roi les embrassa avec tendresse, et étendit sa main sur leur tête : — « Que Dieu vous protège, mes enfants ! leur dit-il ; marchez devant lui dans les voies de la justice… Ne m’oubliez pas… Priez quelquefois pour moi ! »

    Le cardinal de Latil et le docteur Bougon, qui s’étaient rencontrés au chevet du duc de Berry dans la nuit du 13 février 1820, se retrouvaient, dans la nuit du 6 novembre 1836, au chevet de Charles X. On avait dressé à la hâte un autel près de son lit pour y célébrer la messe. Elle fut dite par l’évêque d’Hermopolis, Mgr de Frayssinous. À la fin de la messe, le Roi se recueillit un instant, il pria pour la France et la bénit ; et comme l’Évêque l’exhortait à pardonner, dans cet instant suprême, à ceux qui lui avaient fait tant de mal : — « Je leur ai pardonné depuis longtemps, répondit-il ; je leur pardonne encore dans cet