Page:Chevalier - Accord de l'économie politique et de la morale, 1850.djvu/2

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cieux examen de tout ce qu’ils enseignent. Ils ont à faire passer par le creuset de la critique toute la matière qu’ils se proposent de répandre, afin d’en écarter ce qui s’y rencontrerait d’alliage corrupteur.

Telle est l’analyse que, cette année, je ferai subir à l’économie politique. Nous passerons en revue les idées fondamentales de cette science, et les principales conclusions qu’elle déduit de ses principes. De cette manière, nous nous acquitterons d’un devoir envers la société et envers la science elle-même. Et si nous parvenons à prouver que les conseils de l’économie politique sont conformes à la morale, qu’ils favorisent non-seulement le progrès de la richesse, mais encore le progrès des mœurs publiques et de la publique raison, la conséquence sera qu’elle doit être chère aux hommes de bien et aux bons esprits, et, ce qui n’importe pas moins sous la loi du suffrage universel, qu’elle mérite d’être populaire.

Communément on est porté à considérer l’économie politique comme une science entachée de matérialisme, parce qu’on en prend trop à la lettre la définition accoutumée, que c’est la science qui traite de la richesse des sociétés, ou encore la science qui s’occupe de la production et de la répartition de la richesse. C’est pour cela que j’avais cru devoir m’arrêter à une autre définition. Je vous ai dit, dans mes derniers cours, que l’économie politique était l’application des principes fondamentaux du droit public, existant et reconnu, à l’étude, à l’explication et à l’appréciation des phénomènes qu’embrassent la formation, la répartition et la consommation de la richesse. La science économique, telle qu’elle a été constituée par les maîtres, étant une fois définie en ces termes, il s’ensuivrait qu’elle est raisonnable, honnête et pure, exactement dans la même proportion que les principes de la société ; principes qui, chez les peuples civilisés, sont l’expression la plus élevée de la moralité elle-même. D’où cette autre conséquence, que l’accusation intentée à l’économie politique d’être antisociale, d’être immorale, est d’une flagrante injustice, à moins cependant que les maîtres de la science n’eussent méconnu les principes sociaux, ou qu’ils ne se fussent égarés dans l’application de ces principes aux faits qui concernent la formation, la répartition et la consommation de la richesse.

Mais vous récuserez peut-être cette démonstration comme trop sommaire. J’essayerai de vous en présenter une qui pénètre davantage dans le fond du sujet. Et d’abord, je voudrais écarter de votre esprit ce préjugé trop répandu que c’est une science matérialiste ou matérielle. La réhabilitation de l’économie politique, sous ce rapport, je vous demande pardon de vous le faire remarquer, m’a toujours vivement préoccupé. La première fois que je montai dans cette chaire, en remplacement du professeur illustre que depuis a frappé le poignard d’un assassin, ce fut comme un cri qui s’échappa de ma poitrine : Non, l’économie politique n’est point matérialiste ni matérielle. L’in-