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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/130

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est digne de pitié. Eh bien ! dit-il, ce n’était point malgré vous, ce n’était point par nécessité, c’était de votre plein gré, c’était bien volontairement que vous vous étiez séparés de lui. Vous étiez indignes de ses bienfaits, et il vous a délivrés. Et, tout en rappelant les choses du ciel, il montre que les inimitiés ne sont pas venues du ciel, mais sont venues de la terre. Car depuis longtemps déjà les anges voulaient la réconciliation ; Dieu la voulait aussi : mais vous ne la vouliez pas, vous. Et il montre que dans la suite des temps, les anges n’auraient rien pu faire pour les hommes, si les hommes étaient restés ennemis de Dieu. Ils n’auraient pu ni les persuader, ni, en les persuadant, les délivrer du démon. À quoi bon les persuader, en effet, si celui qui les tenait sous son joug n’avait pas été enchaîné ? À quoi bon l’enchaîner, si ses esclaves n’avaient pas voulu revenir à la liberté ? Il fallait donc la réunion de deux conditions dont ni l’une ni l’autre ne pouvaient être remplies par les anges, et ces deux conditions ont été réalisées par le Christ. C’était donc un plus grand miracle encore de persuader les hommes que de les affranchir de la mort. Le Christ tout seul pouvait accomplir ce dernier miracle ; l’accomplissement du premier dépendait à la fois de lui et de nous. Or, ce qui ne dépend que de celui qui agit, est toujours plus facile. C’est donc du premier de ces miracles que saint Paul parle en dernier lieu, parce qu’il est le plus grand. Il n’a pas dit simplement : Vous étiez les ennemis de Dieu ; il a dit : « Vous étiez éloignés de Dieu » ; ce qui indique une inimitié violente. Et non seulement ils étaient éloignés de Dieu, mais ils ne pensaient pas à revenir à lui. Il dit qu’ils étaient ses ennemis du fond du cœur, faisant voir par là que cette inimitié n’était pas seulement une affaire de choix et de réflexion. Mais que dit-il encore ? « Votre esprit était abandonné à des œuvres criminelles ». Vous étiez, dit-il, les ennemis de Dieu, et vous agissiez en ennemis à son égard.

« Mais maintenant Jésus-Christ vous a réconciliés par la mort qu’il a soufferte dans son corps mortel, pour vous rendre saints, purs et irrépréhensibles devant lui ». Il parle de la manière dont la réconciliation s’est opérée. Après avoir été frappé, flagellé et vendu, le Christ a subi la mort la plus honteuse. Il fait encore ici allusion au supplice de la croix, puis il mentionne un nouveau bienfait. Non seulement le Christ a délivré les hommes, mais, comme il l’a dit plus haut, il les a rendus propres à recevoir ses bienfaits. C’est ce qu’il fait entendre aussi, dans ce passage, par ces mots : « Pour vous rendre saints, purs et irrépréhensibles devant lui ». C’est qu’il a souffert pour les délivrer de leurs maux et pour les élever au plus haut rang, comme un être bienfaisant qui, après avoir délivré un coupable, le ferait monter au faste des honneurs. Non content de les mettre au rang de ceux qui n’ont pas péché, il les met au nombre de ceux qui ont fait les actions les plus grandes et les plus illustres : et, bienfait plus précieux encore, il les a rendus saints devant lui. Remarquez que ce mot irrépréhensible dit encore plus que pur de tout opprobre. Être irrépréhensible, c’est ne pas donner prise à la moindre accusation, au moindre blâme. Mais, après avoir rendu pleine et entière justice à ce Dieu qui a tout fait pour nous, en mourant pour nous, afin de fermer la bouche à ceux qui voudraient dire que nous n’avons plus rien à faire, il a ajouté : « Si toutefois vous demeurez ancrés et affermis dans la foi, et inébranlables dans l’espérance que vous donne l’Évangile (23) ».
Il les reprend ici de leur tiédeur. Il ne se borne pas à dire : « Si vous demeurez », car on peut demeurer debout, tout en chancelant et en s’agitant à droite et à gauche ; on peut encore rester debout, en tournant sur soi-même. Mais il faut rester, dit l’apôtre, « ancré, affermi et inébranlable ». Voyez quel luxe de figures ! C’est peu de ne pas chanceler ; il ne faut pas bouger. Il ne leur impose pas là des devoirs bien lourds, ni bien pénibles à remplir ; il recommande seulement la foi et l’espérance. Il veut dire : Soyez fermes dans la croyance que l’espérance des biens futurs repose sur la vérité. Il ne demande là rien d’impossible ; mais dans la vertu, il faut demeurer inébranlable. C’est ainsi que le devoir devient facile. « Dans l’espérance que donne l’Évangile qu’on vous a annoncé, qui a été prêché à toutes les créatures qui sont sous le ciel ». Or, quelle est cette espérance que donne l’Évangile, si ce n’est le Christ lui-même ? C’est lui qui est notre espoir et qui a opéré toutes ces œuvres. Celui qui met son espoir dans un autre, ne reste plus inébranlable ? Et pour lui, tout est perdu ; s’il ne croit