Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/234

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HOMÉLIE IX.


OR, POUR CE QUI REGARDE LES TEMPS ET LES MOMENTS, MES FRÈRES, VOUS N’AVEZ PAS BESOIN QU’ON VOUS EN ÉCRIVE, PARCE QUE VOUS SAVEZ BIEN VOUS-MÊMES QUE LE JOUR DU SEIGNEUR DOIT VENIR COMME UN VOLEUR DE NUIT. (CHAP. 5,1 À 12)


Analyse.

  1. De l’indiscrète curiosité qui veut pénétrer les mystères. – Il est particulièrement inutile de vouloir connaître l’époque précise de la consommation des siècles. – Réponse à cette idée, que si l’on connaissait le moment, on fermerait la bouche aux gentils. – Le jour du Seigneur doit venir comme un voleur de nuit, non seulement pour le monde, mais pour chacun en particulier.
  2. Il est utile qu’il en soit ainsi. – Quels crimes ne commettrait-on pas, s’il en était autrement ? – Raisons diverses. – Que devient la vertu même, avec la connaissance parfaite de ce qui doit arriver ? – Il faut veiller. – L’avènement du dernier jour comparé avec justesse à un accouchement subit.
  3. Explication de ces expressions, enfants de lumière, enfants du jour, enfants de perdition, enfants de la géhenne. – Qu’est-ce que l’ivresse, qu’est-ce que le sommeil ? – La cuirasse de la foi et de la charité, le casque de l’espérance. – Dieu ne nous a pas appelés pour nous perdre, mais pour nous sauver. – Consolons-nous.
  4. Quelle est l’origine du mal ? En dernière analyse, notre négligence. – Donc, soyons attentifs et diligents. – Pas de vaines recherches. La voie est étroite, pensons-y.
  5. Les plaisirs exquis et raffinés ne servent à rien. – Le bonheur n’est pas là. – Ne pleurons que ce qui mérite d’être pleuré, ne recherchons que ce qu’il faut pour vivre. – Il dépend de nous que Dieu nous prenne en pitié. – Si nous voulons obtenir la miséricorde, faisons tous nos efforts pour en être dignes.

1. Rien n’égale l’inutile et avide curiosité qui pousse l’homme à connaître ce qui est obscur et caché. C’est le propre d’un esprit infirme et mal cultivé. La naïveté dès enfants ne se lasse pas de harceler pédagogues, précepteurs et parents, de mille questions où il n’y a rien que ces mots, quand donc ceci, quand donc cela ? C’est le résultat d’une existence que rien ne gêne, et qui n’a rien à faire. Il y a beaucoup de choses que notre esprit est pressé d’apprendre et de connaître, et surtout l’époque de la consommation des siècles. Rien d’étonnant qu’il nous arrive ce qu’ont éprouvé ces saints apôtres, possédés, plus que personne ne le fut jamais, de la même inquiétude avant la passion, ils entourent le Christ, ils lui disent : « Dites-nous quand ces choses arriveront ? quel sera le signe de votre avènement « et de la consommation du siècle ? » (Mt. 24,3) Après la passion, après la résurrection, ils lui disaient : « Seigneur, sera-ce en ce temps que vous rétablirez le royaume d’Israël ? » (Act. 1,6) Et ce fut là la première question qu’ils lui adressèrent. Il n’en fut pas de même plus tard. En effet, une fois qu’ils ont reçu le Saint-Esprit, non seulement ils ne font plus de questions, non seulement ils acceptent leur ignorance, mais encore ils répriment, chez les autres, une intempestive curiosité.

Écoutez donc ce que dit aujourd’hui le bienheureux Paul : « Or, pour ce qui regarde les temps et les moments, mes frères, vous n’avez pas besoin qu’on vous en écrive ». Pourquoi ne dit-il pas : Personne n’en sait rien ? Pourquoi ne dit-il pas : C’est un secret, mais « Vous n’avez pas besoin qu’on vous en écrive ? » C’est qu’une autre réponse les aurait tourmentés ; celle qu’il leur fait, les console ; ce « vous n’avez pas besoin », montre ce qu’il y a de superflu, d’inutile, dans une recherche qu’il ne faut pas continuer. Car quel profit ? répondez-moi. Mettons la consommation des siècles dans vingt ans, dans trente ans, dans cent ans : après ? Que nous importe ? La consommation n’est-elle pas, pour chacun de nous, la fin de sa vie à lui ? Que signifie ce mal que vous vous donnez pour connaître, et comme enfanter la consommation ? Ce qui nous arrive en d’autres circonstances, nous l’éprouvons ici. En d’autres circonstances, nous négligeons nos affaires particulières pour celles des autres, nous disons : Un tel est un débauché, un tel est un adultère, celui-ci a commis un brigandage, celui-là a fait du tort à tel autre ; nul ne s’occupe de ses affaires ; on s’inquiète de tout ce qui est étranger, plutôt que de ses propres intérêts ; de même ici, chacun de nous, au lieu de s’inquiéter de sa fin particulière, veut savoir quelle sera la fin commune. Eh, que vous importe cette fin universelle ? Faites, dans de