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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/309

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qu’il avait à faire, il l’a fait. Le « témoignage » dont parle l’apôtre (Id), c’est sa passion. Car il est venu rendre témoignage à la vérité du Père, et il a été égorgé. En sorte que non seulement le Père lui rend témoignage, mais lui aussi au Père. « Pour moi », dit-il, « je suis venu au nom de mon Père ». (Jn. 5,43) Et ailleurs : « Nul n’a jamais vu Dieu ». (Jn. 1, 18) Et encore : « Afin qu’ils vous connaissent, vous le seul Dieu véritable » (Jn. 17, 3) ; et : « Dieu est esprit ». (Jn. 6, 24) Il a donc rendu témoignage jusqu’à la mort « en son temps », c’est-à-dire au temps opportun.
3. « C’est pourquoi j’ai été placé comme prédicateur et apôtre (je dis la vérité, je ne ments point) ; docteur des nations dans la foi et la vérité (7) ». Puis donc que le Sauveur a souffert pour les nations, et que c’est aussi pour être docteur des nations que j’ai été mis à part, pourquoi ne priez-vous pas pour les gentils ? Il réclame la confiance, comme ayant été mis à part pour être le docteur des nations ; car les apôtres s’étaient montrés bien lents à cet égard. Il ajoute « docteur des nations, dans la foi et la vérité ». – « Dans la foi » ; ne pensez pas que ce soit un leurre, car il dit aussi : « Dans la vérité » ; ce n’est point une fraude. Vous voyez que la grâce s’étend ; chez les juifs on ne faisait point de prières pour un tel but ; mais maintenant la grâce s’est étendue. « Docteur des nations dans la foi et la vérité ». – « Qui s’est donné comme rançon ». Comment a-t-il été livré par son Père ? C’est que sa bonté l’a voulu. Qu’est-ce que cette rançon ? Il devait punir ces hommes ; ils devaient périr ; mais à leur place il a livré son propre fils, afin que la croix fût prêchée.
C’en est assez pour attirer tous les hommes et pour faire connaître la charité du Christ ; carde tels bienfaits sont immenses et inénarrables. Il s’est immolé lui-même pour ses ennemis, pour ceux qui le haïssent et se détournent de lui. Ce qu’un homme ne ferait pas pour ses amis, pour ses enfants, pour ses frères, le Maître l’a fait pour ses serviteurs ; et non un maître de la même espèce qu’eux, mais un Dieu pour des hommes et pour des hommes coupables. Ce qui ne se fait pas pour ses semblables, s’est fait alors, et nous, objets d’une telle charité, nous semblons nous y refuser, nous n’aimons pas le Christ. Il s’est immolé pour nous, et nous le voyons d’un œil distrait privé de nourriture ; il est malade, il manque de vêtements et nous n’y prenons pas garde. Quelle colère, quels châtiments, quel enfer ne mérite pas une telle conduite ? Quand il n’eût rien fait que daigner s’approprier les souffrances des hommes, que nous dire : J’ai faim, j’ai soif, n’était-ce pas assez pour nous entraîner tous ? Mais, ô tyrannie des richesses, ou plutôt, ô perversité de leurs esclaves volontaires, de telles pensées ont peu de pouvoir ; nous sommes lâches et dissolus, abjects et terrestres, charnels et insensés ; car ce ne sont pas les richesses qui ont cette puissance. Que peuvent-elles ? Dites-le-moi ; elles sont muettes et inanimées. Si le diable, si le mauvais génie ne peut rien sur nous, malgré toute sa malice et bien qu’il trouble tout, quelle force possèdent les richesses ? Quand vous voyez de l’argent, pensez que c’est de l’étain, Mais vous ne le pensez pas ? Pensez alors, ce qui est vrai, que n’est de la terre, car il fait partie de la terre. Mais ce raisonnement ne fait point impression sur vous ? Pensez donc que nous mourrons, nous aussi ; que beaucoup de ceux qui l’ont possédé n’en ont tiré presque nul profit ; qu’un grand nombre de ceux qui s’en sont enorgueillis sont devenus cendre et poussière, qu’ils subissent aujourd’hui les plus rigoureux châtiments, et que bien des hommes qui reposaient sur des lits d’ivoire sont maintenant beaucoup plus misérables que ceux qui avaient des vases de terre et de verre, plus dénués que ceux qui vivaient dans la fange. Mais cela réjouit la vue ? Il est bien d’autres objets qui le peuvent davantage. Les fleurs, l’air pur, le ciel, le soleil la réjouissent bien plus. L’argent se rouille au point que quelques-uns ont montré qu’il est noir, comme on le voit, puisqu’il noircit la serviette qui l’essuie : rien de semblable dans le soleil, dans le ciel et dans les étoiles. Les fleurs ont un aspect bien plus agréable que la couleur de l’argent. Ce n’est donc pas son éclat qui vous enchante, c’est la cupidité, c’est l’injustice ; c’est là ce qui séduit les âmes et non l’argent lui-même.
Chassez la cupidité de votre âme, et vous verrez que ce qui vous paraît si digne d’estime, est plus méprisable que la boue. Chassez la passion : quand ceux qui ont la fièvre aperçoivent une eau bourbeuse, ils désirent s’en abreuver, comme si c’était une source ; ceux dont la santé est bonne ne désirent de l’eau