Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/335

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

verrez bientôt naître la peste. Elle est produite par l’infection qui vient du dehors ; mais celle qui est au dedans, qui est concentrée par le corps et n’a point d’issue, ne produit-elle pas mille maux pour le corps et pour l’âme ? Ce qu’il y a de terrible, c’est que plusieurs murmurent contre Dieu pour les nécessités auxquelles notre corps est soumis, et eux-mêmes les accroissent. Dieu nous a donné ces lois, afin de nous détourner de l’intempérance, afin de nous persuader même par ces moyens de ne pas nous égarer dans les choses de ce monde. Mais vous ne vous laissez pas même par là détourner de l’intempérance ; vous vous y plongez jusqu’au gosier, tant que dure le temps du repas, ou plutôt vous n’attendez pas jusque-là. Le plaisir du goût ne s’éteint-il pas, dès que l’aliment a dépassé la langue et la gorge ? La sensation disparaît alors, mais le malaise se prolonge, parce que l’estomac n’opère pas ou opère avec grand-peine.
L’apôtre a donc dit avec raison : « Celle qui vit dans les délices est morte toute vivante ». Elle ne peut ni se faire entendre, ni entendre, l’âme qui vit ainsi ; elle est amollie, sans générosité, sans courage, sans liberté, timide et impudente, vile flatteuse, ignorante, colère, irascible, pleine de tous les maux et privée de tous les biens. « Celle qui vit dans les délices est morte toute vivante. Et prescrivez-leur d’être irréprochables ». (1Tim. 5,6-7) Vous le voyez, c’est une loi ; il ne le livre pas à leur choix. Prescrivez-leur, dit-il, de ne pas vivre dans les délices, car c’est assurément un mal, et l’on ne peut admettre aux mystères ceux qui vivent ainsi : « Prescrivez-leur d’être irréprochables » ; vous voyez donc qu’il met cette conduite au nombre des péchés ; car ce qui est libre, quand on ne le pratiquerait pas, n’empêche pas d’être irréprochable. Ainsi, obéissant à Paul, nous aussi nous vous avertissons que les veuves qui vivent dans les délices ne sont pas au nombre des veuves. Car si un soldat qui donne son temps aux bains, aux théâtres et à ses affaires est regardé comme un déserteur, combien plus le doit-on dire des veuves ? Ne cherchons point ici notre repos, afin de le trouver dans l’autre vie ; ne vivons pas ici dans les délices, afin de jouir dans la vie future des délices véritables, des véritables plaisirs qui ne produisent aucun mal et nous mettent en possession de tant de biens, que je souhaite à vous tous en le Christ Jésus Notre-Seigneur avec qui soient au Père et au Saint-Esprit, gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours, et aux siècles des siècles. Ainsi soit-il.

HOMÉLIE XIV.

SI QUELQU’UN N’A PAS UN SOIN PRÉVOYANT DES SIENS, ET SURTOUT DE CEUX DE SA MAISON, IL A RENIÉ LA FOI ET EST PIRE QU’UN INFIDÈLE. (V, 8-10)

Analyse.

  • 1. C’est un devoir rigoureux que de s’occuper du salut de ses proches.
  • 2. Des veuves.

3-5. De la pratique de l’aumône. – Vie admirable des solitaires.

  • 6. Il y a aussi des saints dans la vie commune.


1. Beaucoup pensent que leurs vertus personnelles leur suffisent pour le salut et que, s’ils règlent bien leur propre vie, rien ne leur manque plus pour l’opérer. Ils se trompent, et c’est ce que nous montre l’homme qui avait enfoui son unique talent ; il le représenta tout entier, sans perte aucune, et tel que le lui avait confié son maître. C’est aussi ce que nous montre ici le bienheureux Paul, en disant : « Si quelqu’un n’a pas un soin prévoyant des siens ». Et il entend par là toute sorte de prévoyance, tant pour l’âme que pour le corps, car celle-ci est aussi prévoyance. « Des siens et surtout de ceux de sa maison », c’est-à-dire de sa famille. « Celui-là », dit-il, « est pire qu’un infidèle ». C’est ce que dit encore Isaïe. le plus grand des prophètes. « Ne dédaignez point ceux de votre sang ». (Is. 58,7)