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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/337

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dresser un lit, de procurer le repos.
2. Ah ! quelle exactitude dans ses devoirs il demande à une veuve ; presqu’autant qu’à celui qui est chargé de l’épiscopat. Car ce mot : « Si elle s’est appliquée à toute sorte de bonnes œuvres », il le prononce, bien qu’elle n’ait pu les accomplir toutes elle-même, mais elle y a pris part, elle en a été l’auxiliaire. Il écarte ainsi d’elle la mollesse, il veut qu’elle soit vigilante, bonne économe, qu’elle persévère sans cesse dans la prière. Telle était Anne. Considérez quelle perfection l’apôtre réclame des veuves, plus grande presque que celle des vierges mêmes, à qui pourtant il demande une perfection bien haute ; car lorsqu’il dit : « Ce qui est honnête et donne toute facilité pour a s’adresser au Seigneur » (1Cor. 7,35), il comprend en abrégé la vertu tout entière. Vous le voyez, ne pas contracter un second mariage ne suffit pas pour faire une veuve, il faut bien d’autres conditions. Pourquoi en effet ne pas se remarier ? Condamne-t-il ce fait ? Nullement : ce serait une hérésie ; mais c’est qu’il veut qu’elle vaque désormais aux œuvres spirituelles, et qu’elle se consacre tout entière à la vertu. Le mariage n’est point impur, mais il enlève le libre emploi du temps ; l’apôtre en effet dit : Pour vaquer (à la prière), et non : Pour se purifier. Et réellement le mariage amène de perpétuelles occupations. Si donc vous ne vous mariez pas, afin de donner votre temps à la crainte de Dieu, et si vous ne le donnez point en effet, vous n’en tirez point l’avantage de donner vos soins aux étrangers, aux saints. Lors donc que vous négligez ces œuvres, il semble que vous vous êtes plutôt éloignée du mariage parce que vous le condamnez. C’est ainsi qu’une vierge qui n’est pas vraiment crucifiée s’est apparemment abstenue du mariage, parce qu’elle le croit coupable et impur.
Vous voyez que l’apôtre parle de l’hospitalité et non de la simple affabilité, mais de la charité empressée, résultant d’une volonté joyeuse, zélée, accomplissant son œuvre comme si elle accueillait le Christ lui-même. Le Christ, en effet, ne veut point que ces soins soient remis à des servantes ; il veut qu’ils soient remplis par celles mêmes, qui exercent l’hospitalité. « Si j’ai lavé les pieds de mes disciples », dit-il, « combien plus devez-vous le faire les uns envers les autres ». (Jn. 13,14)
Quelque riche que soit une femme, de quelque considération qu’elle jouisse, quand elle serait fière de la noblesse de ses ancêtres, il n’y a pas là tant de distance que du Maître à ses disciples. Si donc vous recevez votre hôte comme le Christ, n’ayez pas honte, mais plutôt soyez glorieuse d u soin que vous lui rendez ; si vous ne le recevez pas comme le Christ, vous ne le recevez point du tout : « Celui qui vous reçoit me reçoit », dit-il. (Mt. 10,40) Si vous ne recevez pas ainsi votre hôte, vous n’aurez point de récompense. Abraham crut accueillir des voyageurs qui passaient, et cependant il ne confia pas tout à ses serviteurs, mais il commanda à sa femme de pétrir de la farine, lui qui avait trois cent dix-huit serviteurs chez lui et parmi eux assurément des servantes ; mais il voulait acquérir lui-même avec son épouse la récompense, non des frais seulement, mais des services.
C’est ainsi qu’il faut témoigner son hospitalité, faisant tout par soi-même, afin que nous soyons sanctifiés et que nos mains soient bénies. Si vous donnez aux pauvres, ne dédaignez pas de donner vous-même, car ce n’est pas au pauvre que vous donnez, mais au Christ. Et qui serait assez malheureux pour dédaigner de tendre la main au Christ ? C’est là l’hospitalité, c’est là vraiment agir pour Dieu. Mais si vous commandez avec orgueil, quand vous assigneriez le premier rang à votre hôte, ce n’est point là de l’hospitalité. Un hôte demande de grands soins, il faut s’estimer heureux qu’il ne rougisse pas de les avoir reçus. Puisque la nature est telle que l’on rougit d’un bienfait reçu, il faut vaincre la honte par l’empressement des services, et montrer par ses actes et ses paroles que le bienfaiteur est l’obligé et reçoit plutôt qu’il ne donne. C’est ainsi que l’action elle-même s’agrandit par la bonne volonté. Car, de même que celui qui croit subir une perte ou être le bienfaiteur, a tout perdu, celui qui se regarde comme favorisé par la bonne œuvre qu’il accomplit a reçu plus qu’il n’a donné. « Dieu aime celui qui donne avec joie ». (2Cor. 9,7) Vous devez au pauvre plus de reconnaissance qu’il ne vous en doit. S’il n’y avait pas de pauvres, vous n’auriez su effacer la multitude de vos péchés ; ils sont les médecins de vos blessures, et leurs mains qu’ils vous tendent sont les remèdes qu’ils vous offrent. La main que le médecin étend vers le