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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/382

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faire pour ceux qui ont dévié de la foi ? Écoutez : « Mais le fondement de Dieu reste ferme ayant pour sceau cette parole : Le Seigneur connaît ceux qui sont à lui » ; et : « Que quiconque invoque le nom de Jésus-Christ, s’éloigne de l’iniquité ».

3. Cela veut dire que même avant d’être renversés ils n’étaient pas fermes ; autrement ils n’auraient pu être renversés par un premier choc. Adam non plus n’était pas ferme avant sa chute. Ceux dont la foi est solidement plantée, excitent l’admiration des séducteurs, loin de subir leur mauvaise influence. Inébranlable comme un édifice assis sur un fondement solide, telle doit être la foi. « Ayant pour sceau cette parole : Le Seigneur connaît ceux qui sont à lui ». Que veut dire cette parole tirée du Deutéronome ? Elle veut dire que les âmes fermes sont si bien attachées à la foi, qu’elles ne peuvent être renversées ni même ébranlées. A quelles marques les reconnaît-on ? Elles ont ces paroles comme écrites sur leurs œuvres ; elles sont connues de Dieu ; elles ne se perdent pas avec la foule ; elles s’abstiennent de l’injustice. « Que quiconque invoque le nom du Seigneur, s’éloigne de l’iniquité ». Voilà quels sont les caractères d’une âme solidement fondée en la foi ; elle est comme un fondement solide. Elle est comme une pierre sur laquelle des lettres sont gravées, lettres pleines de sens, lettres qui sont des œuvres. Ayant encore pour sceau indélébile cette parole : « Que quiconque invoque le nom du Seigneur, s’éloigne de l’iniquité ». Donc tout homme qui est injuste n’adhère point au fondement. C’est donc une marque d’une foi solide, que de ne pas commettre d’injustice.

Ne perdons point ce sceau et cette marque royale ; gardons notre caractère et notre beauté. Ne soyons pas comme une maison qui tombe en ruine, soyons ce fondement, ce fondement solide dont parle saint Paul, – lequel reste immobile dans la vérité. Cela montre que pour appartenir à Dieu, il faut s’éloigner de l’iniquité. Comment, en effet, serait-on à Dieu qui est le Juste par excellence, quand on fait ce qui est injuste, quand on combat Dieu par ses œuvres et qu’on l’outrages par ses actions ? Voilà que nous accusons encore une fois l’injustice, et qu’en l’accusant nous excitons contre nous l’inimitié d’un grand nombre. Ce mal est comme un tyran qui a subjugué toutes les âmes ; et ce qu’il y a de plus fâcheux, c’est qu’il se fait obéir non par la contrainte et la force, mais par la persuasion et la douceur ; on lui sait gré de l’esclavage dans lequel il réduit. C’est réellement là ce qu’il y a plus fâcheux, parce que s’il retenait par la violence et non par l’amour, on échapperait vite à son étreinte. D’où vient qu’on trouve donc une chose en soi si amère ? D’où vient au contraire que l’on trouve amère la justice qui est si douce ? Cela vient de l’état où sont nos sens. Il y en a de même qui trouvent le miel amer et qui goûtent avec plaisir des aliments nuisibles. La cause n’en est pas dans la nature des choses, mais dans la perversion du goût. Tout dépend de notre jugement. Une balance qui trébuche ne saurait peser juste. Il en est de même de notre âme. Si le jugement avec lequel elle balance et pèse toute chose n’est pas étroitement et solidement fixé à la loi de Dieu elle ne peut rien apprécier comme il faut, elle ne fait que vaciller et trébucher à l’aventure.

Si l’on examinait bien exactement, on se convaincrait que l’injustice contient beaucoup d’amertume, non pas seulement pour ceux qui la souffrent, mais aussi pour ceux qui la font souffrir et surtout pour ceux-ci. Sans parler de l’avenir, à s’en tenir au présent, n’engendre-t-elle pas les querelles, les procès, les injures, l’envie et la médisance ? Et quoi de plus amer que tout cela ? N’est-ce pas aussi l’injustice qui produit les haines, les guerres, les délations ? N’est-ce pas elle qui cause le remords qui tourmente l’âme sans relâche ? Je voudrais, si c’était possible, tirer pour un instant l’âme injuste de son enveloppe corporelle, vous la verriez d’une pâleur livide, toute tremblante, couverte de confusion, anxieuse et se condamnant elle-même. Quand même nous serions tombés au fond de l’abîme du mal, la faculté de juger que possède notre raison n’en serait pas altérée, elle demeurerait intacte. Personne ne commet l’injustice, parce qu’il trouve beau de la commettre, mais on se forge des prétextes, et il n’est rien qu’on ne tente pour se disculper du moins en paroles. Mais grâce à la conscience on n’y peut jamais parvenir. En apparence, la pompe des paroles, la corruption des princes, la multitude des flatteurs obscurcissent la justice ; mais dans le fond de la conscience il n’y a rien de tout cela, il n’y a pas de flatteurs, il n’y a