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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/384

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moyen de guérison, ce serait même de la cruauté et de la barbarie. Si, lorsque les médecins désespèrent de guérir nos corps, nous ne laissons pas que de les encourager et de leur dire : Ne vous rebutez point, jusqu’à ce que le malade ait rendu le dernier soupir faites ce qui dépendra de vous, usez de tous les moyens ; ne devons-nous pas à plus forte raison faire de même pour les âmes malades ? Une âme peut aller jusqu’aux portes de l’enfer, jusqu’aux dernières limites du vice, et revenir après à résipiscence, se corriger, revenir au bien et acquérir la vie éternelle. Combien en a-t-on vus que dix sermons n’ont pu toucher, et que le onzième a convertis ? Ou plutôt, ce n’est pas le onzième tout seul qui a opéré leur conversion, les dix premiers, sans les toucher visiblement, avaient déposé dans leurs âmes une semence qui a enfin porté son fruit. C’est ainsi qu’un arbre recevra dix coups de hache sans branler, et qu’un onzième coup le fera tomber. Cependant ce n’est pas le dernier coup qui a tout fait ; s’il a réussi, c’est grâce aux dix premiers. En regardant à la racine on se rend compte de ce fait, mais on ne s’en rend pas compte en regardant le sommet ou même le tronc de l’arbre. C’est la même chose ici. Les médecins appliquent quelquefois de nombreux remèdes sans arriver à aucun résultat, puis un dernier qu’ils emploient amène enfin la guérison. Ce n’est pas cependant le dernier remède qui a tout fait, les autres avaient déjà préparé l’œuvre qu’il a enfin accomplie. Donc si les instructions que nous entendons ne donnent pas immédiatement leur fruit, elles le donneront plus tard ; j’en ai la ferme confiance. Le désir que vous témoignez d’entendre la parole de Dieu ne tombera pas en pure perte, ce n’est pas possible. Puissions-nous, nous tous qui avons été jugés dignes d’entendre les enseignements de Jésus-Christ, obtenir les biens éternels ! Ainsi soit-il.




HOMÉLIE VI.


OR, DANS UNE GRANDE MAISON IL N’Y A PAS SEULEMENT DES VASES D’OR ET D’ARGENT, MAIS AUSSI DE BOIS ET DE TERRE ; ET LES UNS SONT POUR DES USAGES HONNÊTES, LES AUTRES POUR DES USAGES HONTEUX. SI QUELQU’UN DONC SE GARDE DE TOUT CE QUI EST IMPUR, IL SERA UN VASE D’HONNEUR SANCTIFIÉ ET PROPRE, AU SERVICE DU SEIGNEUR, PRÉPARÉ POUR TOUTES SORTES DE BONNES ŒUVRES. (II, 20, 21, JUSQU’À LA FIN DU CHAPITRE).



Analyse.
  1. Pourquoi Dieu souffre les méchants dans le monde.
  2. Que le serviteur de Dieu s’abstienne des contestations.
  3. et 4. Celui qui est assujetti au diable en quelque chose, lui est assujetti en tout. – Exhortation à l’aumône.

1. Pourquoi Dieu laisse-t-il vivre les méchants ? pourquoi ne les fait-il pas tous périr ? Voilà une question qui jette le trouble dans beaucoup d’esprits. On pourrait donner de cela plusieurs raisons, par exemple que Dieu attend leur conversion, ou qu’il veut par leur punition intimider les autres. Ici saint Paul en apporte une raison très-plausible : il dit que « dans une grande maison, il n’y a pas seulement des vases d’or et d’argent, mais aussi de bois et de terre » ; ce qui veut dire : De même que dans une grande maison il faut qu’il y ait différentes sortes de vases, ainsi il faut qu’il y ait dans le monde diverses espèces de personnes. Et lorsqu’il s’exprime ainsi, ce n’est pas l’Église, mais le monde qu’il a en vue. N’allez pas en effet appliquer cette parole à l’Église. L’Église qui est le corps même, du Christ, l’Église qui est une vierge pure, n’ayant ni souillure ni ride, l’Église ne soutire pas des vases de bois ou de terre, elle ne veut que des vases d’or et d’argent. Ce qu’il dit revient à ceci : Ne vous troublez point de ce qu’il y a des méchants, des scélérats, puisque dans une grande maison vous trouvez aussi des vases d’ignominie. Mais tous ces vases, dites-vous, ne sont pas également en honneur ; les uns sont pour des usages, honnêtes, les autres pour des usages honteux. Cependant ces vases, quelque vils qu’ils soient, ne laissent pas de tenir leur place et