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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/400

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cesse ces pensées présentes à l’esprit, et quoi qu’il arrive nous ne nous troublerons point. Lisons les Écritures, et nous y trouverons beaucoup d’exemples semblables, lisons-les, car elles nous instruiront pour le salut, comme dit saint Paul à son disciple, puisqu’elles nous marquent ce que nous devons ou ce que nous ne devons pas faire. Écoutez ce que dit encore ce bienheureux apôtre dans un autre endroit : « Vous vous flattez d’être le conducteur des aveugles, la lumière de ceux qui sont dans les ténèbres, le docteur des ignorants, le maître des simples et des enfants ». (Rom. 2,19) Voyez-vous que la loi est la lumière de ceux qui sont dans les ténèbres ? Si l’on peut dire de la loi qui nous a donné la lettre, la lettre qui tue, qu’elle est une lumière, que dira-t-on de la loi qui nous a donné l’Esprit qui vivifie ? Si la loi ancienne est une lumière, que sera la loi nouvelle qui nous a révélé de si grands mystères ? Que diraient des personnes qui ne connaîtraient que la terre, et à qui on découvrirait tout à coup le ciel et les merveilles qu’il renferme ? Or, il n’y a pas moins de différence entre l’Ancien et le Nouveau Testament. Le Nouveau Testament nous a fait connaître avec certitude les supplices de l’enfer, le bonheur du ciel, et la sévérité du jugement final.

N’ajoutons pas foi aux jongleries des devins, il n’y a là que de l’imposture. – Mais, direz-vous, si cependant ce qu’ils disent arrive ? Cela arrive parce que vous y croyez, si toutefois cela arrive. Mais un charlatan vous tient captif, il est maître de vous, de votre vie, il fait de vous ce qu’il veut. Dites-moi, si un chef de brigands avait entre ses mains et dans sa puissance le fils d’un roi qui se serait donné à lui et qui serait venu volontairement vivre dans sa société, pourrait-il lui dire s’il vivra ou s’il mourra ? Assurément il le pourrait ; non pas parce qu’il saurait l’avenir, mais parce qu’il serait le maître de laisser vivre ou de faire mourir l’enfant qui l’aurait fait l’arbitre de sa destinée. Il est clair que ce chef de brigands pourrait disposer à son gré de cette vie qu’on lui a livrée, de l’anéantir ou de la laisser subsister. Il peut encore lui dire : Vous serez riche ou vous serez pauvre, parce qu’il peut faire l’un et l’autre. La plus grande partie de la terre s’est elle-même assujettie à la puissance du démon.

5. De plus l’homme qui s’est habitué à ajouter foi aux paroles de ces imposteurs, devient d’une crédulité qui fait admirablement leurs affaires. On ne remarque même pas s’ils se trompent, mais seulement si par hasard ils rencontrent juste. S’il est vrai qu’ils savent prédire l’avenir, amenez-les-moi à moi qui suis fidèle. Ce n’est pas l’orgueil qui me fait parler de la sorte ; il n’y a pas assez de mérite à s’affranchir de ces sottises, pour qu’on en soit fier. Je suis plein de péchés, mais je ne crois pas pour cela devoir m’humilier ici ; par la grâce de Dieu je me ris de tous ces sortilèges. Je vous le répète, amenez-moi un de vos magiciens, et s’il a quelque vertu prophétique, qu’il me dise ce qui m’arrivera demain, ce que je deviendrai. Je suis sûr qu’il ne parlera pas. Car je suis sous la puissance de mon roi légitime. Le tyran n’a aucun pouvoir sur moi ; je me tiens éloigné de ses antres et de ses cavernes ; je sers dans l’armée du roi mais, direz-vous, un tel a commis un vol, et tel magicien l’a décelé. Cela n’est pas toujours vrai. Ce n’est qu’une plaisanterie, ce n’est qu’un mensonge. Ils ne savent rien ; s’ils savent deviner, ils devraient bien employer leur art pour eux-mêmes, et dire que sont devenues les offrandes de leurs idoles qui ont été enlevées, et découvrir tout l’or qui a été fondu. Pourquoi ne l’ont-ils pas prédit à leurs prêtres ? Ils ne savent donc rien. Ainsi ils ne peuvent pas dire même un mot pour sauver leurs richesses ni pour prévenir les incendies qui les ont souvent dévorés eux et leurs temples. Pourquoi ne s’occupent-ils pas d’abord de leur propre salut ? Si donc ils ont jamais fait une prédiction qui se soit réalisée, ç’a été par pur hasard.

Nous avons des prophètes nous autres, mais ils ne se trompent jamais. On ne les voit point tantôt rencontrer juste, tantôt se tromper, mais dire infailliblement la vérité. Le propre de la vertu prophétique est en effet de ne se tromper jamais. Abstenez-vous donc, mes frères, je vous en conjure, abstenez-vous de ces folies, si vous croyez en Jésus-Christ. Que si vous ne croyez pas en Jésus-Christ, pourquoi vous dégradez-vous, pourquoi vous trompez-vous vous-mêmes ? Jusques à quand clocherez-vous des deux jambes ? Pourquoi allez-vous à ces devins ? Que leur demandez-vous ? Dès que vous allez à eux, dès que vous les interrogez, vous vous faites leur esclave. Si vous les consultez, c’est que vous croyez en eux. – Nullement, dites-vous, je les consulte, non parce que j’ai