Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/578

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

nous montrer qu’ainsi placé sur tout notre horizon, il nous procurera plus d’ombre et de sécurité. – Quelle est « cette nuée », et quel, ce nombre de « témoins ? » Il s’agit de témoins empruntés soit à l’Ancien, soit au Nouveau Testament. Les premiers aussi ont été vraiment martyrs, témoins attestant avec courage la grandeur de Dieu ; ainsi les trois enfants, ainsi Élie et tous les prophètes.
« Dégageons-nous de tout ce qui appesantit ». Qu’est-ce que tout ce fardeau ? La somnolence, la négligence, tout le bagage, en un mot, des pensées humaines. « Et le péché si facile à environner ». Cette expression a deux sens : Le péché facilement nous entoure et nous assiège ; ou bien, et je préfère l’entendre ainsi, le péché facilement sera par nous-même environné et battu ; car, si nous le voulons, il nous est aisé de le vaincre. – « Courons par la patience dans la carrière qui nous est ouverte ». Il ne dit pas : Combattons, luttons, faisons la guerre ; mais ce qui est plus doux que tout cela, car il ne nous propose qu’une course. Il ne nous dit pas davantage : Soyons les premiers à courir ; mais seulement : Fournissons une carrière soutenue et persévérante, et ne nous montrons pas lâches ni énervés. Courons, dit-il, dans la lice devant nous ouverte.
Enfin la consolation principale, la souveraine exhortation, le premier et le dernier de tous les exemples, l’apôtre le propose, c’est Jésus-Christ. « Jetant les yeux sur Jésus-Christ, l’auteur et le consommateur de notre foi (2) » ; c’est bien ce que Jésus-Christ disait constamment de lui-même à ses disciples : « S’ils ont appelé le maître Béelzébuth, combien plus ses serviteurs ! » Et ailleurs : « Le disciple n’est pas au-dessus du Maître, ni l’esclave au-dessus de son propriétaire ». (Mt. 10,24-25) Donc, regardons-le, dit saint Paul, afin d’apprendre à courir ; oui, voyons toujours Jésus-Christ. En effet, de même que pour apprendre un art ou pour nous dresser à une lutte quelconque, le regard fixé sur un maître nous grave dans l’esprit ses procédés, et notre vue lui dérobe tous ses secrets ; ainsi, dans la vie présente, si nous voulons fournir notre course, et surtout la fournir honorablement, nous regardons vers Jésus, l’auteur et le consommateur de notre foi. Et pourquoi ces deux titres ? C’est qu’il nous a donné la foi, qu’il nous en a versé le principe. C’est encore une de ses paroles à ses disciples « Vous ne m’avez pas choisi ; c’est moi qui ai fait choix de vous ». (Jean 15,16) Paul disait de même : « Je le connaîtrai alors, comme j’ai été connu de lui ». (1Cor. 13,12) Et si Jésus a déposé en nous le principe et le germe, c’est lui encore qui nous donnera la fin et le fruit.
« Jésus au lieu d’une vie heureuse et tranquille qui lui était proposée, a souffert la croix, en méprisant la honte et l’ignominie ». Comprenez qu’il lui était permis de ne pas souffrir, s’il l’eût préféré ; car il n’a pas commis de péché, et le mensonge ne fut jamais trouvé dans sa bouche (Is. 53,9) ; lui-même l’atteste au saint Évangile : « Le prince de ce monde est venu, mais il n’a aucune prise sur moi ». (Jn. 14,30) Il était donc libre de ne pas marcher au Calvaire. Car, disait-il, « j’ai le pouvoir de déposer mon âme et le pouvoir aussi de la reprendre ». (Jn. 10,18) Si donc, sans nécessité aucune de subir la croix, il a voulu pour nous monter en croix, combien plus est-il juste que nous souffrions tout pour lui ? – La joie lui était proposée, dit saint Paul, et il a subi la mort, « méprisant l’opprobre ». En quoi, ce mépris de l’opprobre ? C’est qu’il a choisi, dit l’apôtre, une mort infâme. – Je comprends, direz-vous, qu’il soit mort ; mais pourquoi si honteusement ? – Uniquement pour nous apprendre à regarder comme rien toute gloire qui vient des hommes. Sans avoir jamais été assujetti au péché, il a choisi une mort semblable, pour nous apprendre à être bardis contre elle, à l’estimer comme le néant. – Enfin, pourquoi l’apôtre ne dit-il pas : Méprisant « la tristesse », mais l’opprobre et la honte ? Parce qu’il affronta la mort sans tristesse. Or, écoutez quelle fut la fin, pour Jésus ? « Et maintenant il est assis à la droite de Dieu ». Vous voyez le prix du combat que saint Paul décrit autrement ailleurs : « C’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom, de sorte qu’au nom de Jésus, tout genou fléchit ». (Phil. 2,9) Il parle de la sainte humanité de Jésus. Ainsi, bien évidemment, quand même on ne nous proposerait aucun prix de la victoire, un tel exemple suffirait pour nous déterminer à soutenir chacun vaillamment notre lutte et notre combat. Mais maintenant, des récompenses aussi nous sont offertes, et non des prix tels quels, mais de grands, mais d’ineffables prix. Ainsi, quelle que soit la souffrance qui nous ait visités, pensons à Jésus, plutôt même qu’à ses apôtres. Pourquoi ? C’est que toute la vie du Sauveur fut remplie d’amertume. Toujours il entendit d’horribles accusations de folie, de séduction, de faux miracles ; les juifs disaient tantôt : « Cet homme ne vient pas de Dieu » ; tantôt : « Non, il séduit les masses » ; tantôt : « Ce séducteur disait quand il vivait encore : Je ressusciterai dans trois jours ». Ils l’accusaient de jonglerie et de magie, disant : « C’est par Béelzébuth qu’il chasse les démons » ; ils le taxaient de fou, de possédé du diable : « N’avons-nous pas raison de dire qu’il est fou et possédé du démon ? » (Jn. 9,16 ; 7, 12 ; 10, 20 ; Mt. 27,63 ; 12, 24) Et il entendait cet affreux langage, pendant qu’il les accablait de ses bienfaits, qu’il faisait des miracles, et montrait les œuvres d’un Dieu. Qu’on eût ainsi parlé de lui, s’il n’avait rien fait, on serait moins surpris. Mais qu’enseignant une doctrine de vérité, il s’entendît appeler séducteur ; que chassant les démons, il s’entendît insulter comme possédé du démon ; qu’on l’appelât menteur et hypocrite, lui qui démolissait toute fourberie, n’est-ce pas étonnant et incroyable ? Telles étaient pourtant leurs accusations de tous les jours.
3. Voulez-vous entendre les plaisanteries et les moqueries qu’on lui décochait ? La moquerie est bien ce qui nous mord le plus vivement au cœur. Eh bien ! voici, d’abord, contre sa naissance. « N’est-il pas », disaient les juifs, « n’est-il