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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/263

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pour certains articles, pour les droits d’examen et de change, pour je ne sais quel entretien de cire. Ce ne sont pas là, Romains, des noms de droits réels, mais des noms de vols iniques. Car quel droit de change peut-il y avoir dans une province où tous les peuples ont la même monnaie ? Et qu’appelle-t-il entretien de cire ? comment ce nom est-il entré dans les comptes d’un magistrat, dans un compte de finances publiques ? Il est une troisième déduction qui s’est faite comme si elle eût été, non seulement permise, mais ordonnée ; non seulement ordonnée, mais nécessaire. On tirait sur la somme totale deux cinquantièmes pour le greffier.

Quel exemple, quelle loi, quel arrêté du sénat, quel principe d’équité, vous ont autorisé à permettre à votre greffier de prendre tout cet argent, ou sur les biens des agriculteurs, ou sur les revenus du peuple romain ? Car si l’on peut, sans injustice, prendre cet argent aux agriculteurs, il faut le remettre au peuple romain, surtout dans de tels embarras du trésor. Mais si le peuple romain voulait, et s’il était juste qu’on payât les cultivateurs, votre appariteur s’enrichira-t-il à leurs dépens, pour suppléer aux gages modiques qu’il reçoit du peuple ? Et Hortensius, à ce sujet, animera-t-il contre moi l’ordre des greffiers ? dira-t-il que j’attaque et veux détruire leurs droits et leurs privilèges ? comme si cette gratification accordée aux greffiers était appuyée d’une seule loi ou d’un seul exemple. Faut-il remonter aux temps anciens ? faut-il parler de ces greffiers que l’on sait avoir été des modèles de probité et d’intégrité ? Les anciens exemples, je le sais, ne sont plus reçus et ne sont plus regardés que comme des fictions, des fables ; je m’arrêterai donc à nos temps de corruption. Il n’y a pas longtemps, Hortensius, que vous avez été questeur ; vous pouvez dire ce qu’ont fait vos greffiers ; voici ce que je dis des miens (c’étaient deux hommes remplis de probité, L. Mamilius et L. Sergius) dans la même province de Sicile, lorsque je payais aux villes leur blé, on n’a déduit ni ces deux cinquantièmes, ni même un seul sesterce pour personne.

LXXIX. Pour moi, Romains, si les greffiers m’eussent demandé une pareille gratification, s’ils y eussent seulement pensé, oui, je l’avouerais, ce serait à moi seul qu’il faudrait en faire un crime. Et pourquoi ferait-on une déduction pour un greffier, et non plutôt pour le muletier qui apporte la somme, pour le courrier qui l’annonce, pour l’huissier qui avertit de la venir prendre, pour l’appariteur ou l’esclave de Vénus qui la transporte à la caisse ? Quelle peine le greffier s’est-il donnée dans cette affaire, ou quel avantage a-t-il procuré, pour qu’on lui accorde un si fort salaire, je dis même pour qu’on lui abandonne quelque portion d’une somme si considérable ? L’ordre des greffiers est un ordre honorable. Qu’est-ce qui le nie ? ou qu’est-ce que cela fait à la chose ? C’est un ordre honorable, parce qu’on remet à leur foi les registres publics et les actes des magistrats. Aussi demandez aux greffiers qui sont dignes de cet ordre, qui sont pères de famille, pleins de probité et de vertu, ce que veulent dire ces cinquantièmes ; vous verrez qu’une pareille gratification leur paraît aussi nouvelle qu’odieuse. Citez-moi ces greffiers, si vous le voulez ; mais n’allez pas chercher ceux qui, ayant grossi peu à peu leur fortune aux dépens de nos dissipateurs et par de méprisables gratifications