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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/704

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DISCOURS DE CICÉRON AU SÉNAT,
APRÈS SON RETOUR.

DISCOURS VINGT-SEPTIÈME.


INTRODUCTION.

Ce discours et les trois qui suivent, ad Quirites post reditum ; pro Domo sua ad pontifices ; de Aruspicium responsis, ont été considérés par des savants d’au delà du Rhin, Markland, Wolf et Reiske, comme des ouvrages forgés par quelque déclamateur. Certaines altérations dans le texte, quelques fautes de copiste ont servi de fondement à ce paradoxe de la philologie allemande. Le débat n’a pas été sans quelque éclat. Aujourd’hui il serait puéril de le réveiller, et inutile de le juger. Il suffit de lire ces discours pour y reconnaître la main de Cicéron.

De ces quatre discours, le premier qui a été prononcé est celui Post reditum in senatu. Cicéron lui-même en fixe le rang et en marque la date dans la lettre où il raconte à Atticus les détails de son retour de l’exil. « Le lendemain de mon arrivée à Rome, dit-il (5 septembre 696), je fis mes remercîments au sénat…. Ensuite je parlai dans l’assemblée publique. » C’est le discours aux Romains.

Voir, sur l’exil et le retour de Cicéron, le Précis historique de sa vie en tête du premier volume.


I. Si mes remercîments, pères conscrits, ne peuvent complètement répondre aux faveurs immortelles dont vous nous avez comblés, mon frère, mes enfants et moi, je vous prie et je vous conjure de l’attribuer moins à la faiblesse de ma reconnaissance qu’à la grandeur de vos bienfaits. Quel génie assez fécond, quelle élocution assez abondante, quel discours assez divin, assez merveilleux, pourrait, je ne dis pas embrasser et développer, mais simplement énumérer tout ce que vous avez fait pour ma famille ? Vous avez rendu un frère à mes regrets, moi-même à sa tendresse, à nos enfants les auteurs de leurs jours, à nous nos enfants ; vous m’avez rendu ma dignité, mon rang, ma fortune, la plus illustre république, la patrie : et quoi de plus doux que la patrie ! enfin, vous me rendez moi-même à moi-même. Si je dois aimer tendrement, et ceux qui m’ont donné la vie, un héritage, la liberté, les droits de citoyen ; et les dieux immortels qui m’ont dispensé ces dons et tous les autres ; et le peuple romain, dont les suffrages m’ont élevé au plus haut degré de dignité dans cette illustre assemblée, dans ce conseil, l’asile de toutes les nations ; et cet ordre lui-même, qui m’a souvent honoré des plus magnifiques décrets : combien ne vous suis-je pas à jamais redevable, à vous qui, avec une bienveillance singulière et un accord unanime, me faites recouvrer en même temps ce que mes parents m’avaient transmis, et les faveurs des dieux immortels, et les honneurs du peuple romain, et les témoignages nombreux de votre estime ! Car si je vous devais beaucoup à vous-mêmes, beaucoup au peuple romain, infiniment à mes parents, et tout aux dieux immortels, les bienfaits que je