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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/15

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DE LA VIEILLESSE.

les effets de la maturité : le vieillard tombe comme un fruit mûr. C’est ce que le sage supporte avec douceur. Résister à la nature, n’est-ce pas vouloir, comme les géants, faire la guerre aux dieux ?

Lélius. Eh bien ! Caton, vous pouvez nous donner à tous deux (car je ne crains pas de parler pour Scipion) la plus agréable preuve d’amitié : comme nous espérons, que nous désirons même devenir vieux, apprenez-nous d’avance par quels moyens nous pourrons supporter facilement le poids de l’âge avancé.

Caton. Je le ferai volontiers, Lélius, surtout si cela doit vous être agréable à l’un et à l’autre, comme vous me le dites.

Scipion. Oui, Caton, nous voudrions tous deux, si ce n’est pas trop exiger de vous, qu’après avoir, pour ainsi dire, parcouru une longue route que nous devons aussi entreprendre, vous nous fissiez connaître le pays où vous êtes arrivé.

III. — Caton. Je le ferai comme je pourrai, mes amis. J’ai entendu souvent les plaintes de ceux de mon âge ; car, pour me servir du vieux proverbe, qui se ressemble s’assemble(7), C. Salinator, Sp. Albinus, tous deux consulaires et à peu près de mon âge, se plaignaient sans cesse, tantôt de ce qu’ils étaient privés des plaisirs sans lesquels, disaient-ils, la vie n’est rien ; tantôt de ce qu’ils étaient dédaignés par ceux dont ils étaient accoutumés à recevoir les hommages. Il me semble qu’ils avaient tort d’en accuser la vieillesse. Si c’étaient là des peines qu’il fallût lui imputer, je les sentirais aussi-bien que tous les vieillards : or, j’en ai connu beaucoup qui ne faisaient aucune de ces plaintes, qui se voyaient sans peine détachés des vains plaisirs de la jeunesse, et qui n’étaient point délaissés. C’est sur les mœurs et non sur l’âge qu’il faut rejeter la cause