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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/187

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dans sa harangue ! Vous eussiez dit du chef des Romains et non de leur concitoyen[1] ; mais vous y étiez présents, et sa harangue a été publiée. Aussi cette loi, quoique populaire, fut rejetée par les suffrages du peuple même. Et pour en revenir à moi, vous vous souvenez de la loi que voulait faire passer C. Licinius Crassus, sous le consulat de Q. Maximus, frère de Scipion, et de L. Mancinus, et vous n’avez pas oublié combien elle était populaire : elle transportait au peuple la nomination des collèges. De plus, ce Crassus avait donné le premier l’exemple de se tourner vers le peuple en parlant dans le forum(27). Cependant la religion des dieux immortels, défendue par nous, l’emporta facilement sur les flatteries de son discours. Je soutins cette lutte pendant ma préture, cinq ans avant mon consulat ; ce ne fut donc pas une autorité imposante qui triompha, mais la vérité.

XXVI. Si donc sur la scène même, et j’appelle ainsi l’assemblée du peuple, où dominent l’illusion et tous les genres de prestiges, la vérité, pour peu qu’elle se montre et qu’elle brille aux yeux, exerce une influence si puissante, quelle force ne doit-elle pas avoir dans l’amitié, qui repose tout entière sur la vérité ? Si votre âme, comme on dit, ne se montre à nu ; si vous ne lisez dans celle de votre ami, plus de confiance, plus de sécurité : vous ne pourrez même jamais aimer ni être aimé, tant qu’il y aura des doutes entre vous et votre ami. Il faut le dire cependant, la flatterie en amitié, quoique pernicieuse, ne peut nuire qu’à celui qui la reçoit et qui s’y livre avec plaisir. Nul ne prête une oreille plus favorable aux flatteurs que celui qui se flatte

  1. Grévius, Ernesti, Lallemand, Wetzel, ont tort de vouloir supprimer non comitem ; Cicéron emploie souvent l’antithèse de dux et de comes.