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Page:Cicéron - Œuvres complètes, Lefèvre, 1821, tome 28.djvu/287

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que vous avec celles du vôtre : ici du moins vous êtes adroit, et vous ne craignez pas que je vous rende la pareille ; il n’y a point de femme chez vous. Seul, vous suffiriez à la sévérité de mes reproches, et dans toute votre maison personne ne vous surpasse en infamie. Mais vous vous êtes étrangement mépris, en croyant me faire un crime de l’état de mes affaires domestiques. Ma fortune est bien au-dessous de ce qu’elle devrait être ; mais plût aux dieux qu’elle fût moindre encore! combien il serait plus consolant pour moi de jouir de la société de mes amis, que de me voir enrichi par leurs testaments(3) !

Vous dites, Salluste, que j’ai pris la fuite. J’ai cédé à la fureur d’un tribun du peuple ; j’ai mieux aimé tout souffrir moi seul que d’exciter une guerre civile parmi les Romains. Mais quand cet insensé eut rempli une année tout entière de sa rage et de son délire, et que le calme eut succédé aux tempêtes qu’il avait soulevées ; alors, sur un décret du sénat, la république me ramena comme par la main, et je rentrai dans ma patrie. Ce jour est à mes yeux le plus beau de ma vie, ce jour où le corps entier du sénat, où le peuple romain vint au-devant de moi me féliciter de mon retour. C’est ainsi qu’ils jugèrent un lâche toujours prêt à fuir, un avocat mercenaire.

IV. Et certes, il ne faut pas s’étonner si j’ai toujours obtenu l’amitié de tous les bons citoyens ; car je ne me suis point fait le serviteur et l’esclave d’un seul particulier, et c’est sur les dispositions de chacun pour le bien de l’état, que j’ai réglé mon amitié ou ma haine. J’ai voulu sans cesse que la paix l’emportât sur tous les autres intérêts ; plusieurs ont flatté imprudemment des intérêts privés. Je n’ai craint que les lois ; plusieurs