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Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.8.djvu/235

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audace, et il a fini par demeurer convaincu de faits aussi graves que manifestes. Pour moi, je crois que les dieux ont permis qu’il tombât dans un pareil excès, afin que non-seulement ses premiers méfaits, mais les crimes qu’il a commis envers Carbon et Dolabella (67) ne restassent pas impunis.

LXXVII. Il y a dans le délit dont nous nous occupons, juges, une circonstance remarquable, et qui doit ne laisser aucun doute sur les vexations au sujet de la dîme. Car, pour ne point répéter ici que beaucoup de cultivateurs, n’ayant pas assez de grains pour vendre au peuple romain la seconde dîme et leur contingent de huit cent mille boisseaux, se virent obligés d’en acheter de votre agent, je veux dire d’Apronius, ce qui prouverait seul que vous ne leur aviez rien laissé ; quand je ne parlerais pas de ce fait attesté par une foule de témoins, n’est-il pas de la plus grande évidence que, pendant vos trois années de préture, vous avez eu en votre pouvoir et entassé dans vos magasins, je ne dis pas seulement tout le blé de la Sicile, mais tous les produits des terres domaniales ? Car enfin, puisque vous exigiez des villes de l’argent au lieu de grains, d’où tiriez-vous les grains que vous envoyiez à Rome, si vous n’aviez tenu enfermé et en réserve dans vos magasins toutes les récoltes ? D’abord, sur les grains, votre premier bénéfice a consisté à enlever aux cultivateurs ces mêmes grains. En second lieu, ces mêmes grains qu’au mépris de toutes les lois vous avez eus en votre possession pendant trois ans, vous les avez vendus non pas une fois, mais deux ; non pas à un seul prix, mais à deux prix différens. Une première fois aux villes, à raison de quinze sesterces le médimne ; puis au peuple romain, à qui vous avez pris dix-huit sesterces