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Page:Claudel - La Messe là-bas, 1919.djvu/20

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expliquer de nous-mêmes avec Vous en ce mot que nous avons découvert,

Ce n’est pas trop de fourrager la mer et le ciel et d’aller jusqu’au bout de la terre.

Où est-il, ce mot essentiel enfin, plus précieux que le diamant,

Cette goutte d’eau pour qu’elle se fonde en Vous, notre âme, comme l’amante en son amant ?

Ce mot qui est comme le consentement à la mort, Votre présence au delà de toutes les images !

Ce n’est pas payer trop cher de mourir, mon Dieu, afin que Vous existiez davantage !

Mon Dieu, pourquoi m’avez-vous repoussé ? Mon âme, pourquoi êtes-vous triste ?

Que me veut cet ennemi en moi qui s’attarde et qui résiste ?

Debout ! de ce lieu où j’étais pour aller à celui où je ne suis pas encore.

Quand la lampe du ciel pâlit, c’est pour cela que je me suis levé avec l’aurore :

A l’heure où les grands palmiers se réveillent, tout ruisselants de la rosée matinale,

Et l’on voit une raie d’or la mer au bout de la chaussée coloniale.

De ce qui n’était que beauté pour passer à ce qui est amour,

Il faut profiter de cet appel qui précède celui du jour.