Aller au contenu

Page:Claudine a l'Ecole.pdf/156

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
claudine à l’école

je te ferai renvoyer chez nous sous prétexte que tu ne travailles pas. » Alors, tu penses, je n’ai plus eu qu’à me taire.

— Houche ! Mademoiselle revient.

Effectivement, Mlle Sergent s’approche de nous, quittant son air tendre et riant pour sa figure d’institutrice :

— Vous avez fini, Mesdemoiselles ? Je vais vous dicter un problème de géométrie.

Des protestations douloureuses s’élèvent, demandant encore cinq minutes de grâce. Mais Mlle Sergent ne s’émeut pas de cette supplication, qui se renouvelle trois fois par jour, et commence tranquillement à dicter le problème. Le ciel confonde les triangles semblables !

J’ai soin d’apporter souvent des bonbons à dessein de séduire complètement la jeune Luce. Elle les prend sans presque dire merci, en remplit ses petites mains et les cache dans un ancien œuf à chapelet, en nacre. Pour dix sous de pastilles de menthe anglaise, trop poivrées, elle vendrait sa grande sœur et encore un de ses frères par-dessus le marché. Elle ouvre la bouche, aspire l’air pour sentir le froid de la menthe et dit : « Ma langue gèle, ma langue gèle » avec des yeux pâmés. Anaïs me mendie effrontément des pastilles, s’en gonfle les joues, et redemande précipitamment avec une irrésistible grimace de prétendue répugnance :