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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/325

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claudine à l’école

que !… » M. Jean Dupuy remercie d’un geste étriqué, mais suffisant. Un gros monsieur, brodé d’argent, coiffé d’un bicorne, la main sur la poignée de nacre d’une petite épée, vient se placer à la gauche de l’illustre, un vieux général à barbiche blanche, haut et voûté, le flanque du côté droit. Et l’imposant trio s’avance, grave, escorté d’une troupe d’habits noirs, à cordons rouges, à brochettes, à Medjidiés. Entre des épaules et des têtes, je distingue la figure triomphante de cette canaille du Dutertre, acclamé par la foule qui le choie en tant qu’ami du ministre, en tant que futur député.

Je cherche des yeux Mademoiselle, je lui demande du menton et des sourcils : « Faut-il y aller du petit speech ? » Elle me fait signe que oui, et j’entraîne mes deux acolytes. Un silence surprenant s’établit soudain ; — mon Dieu ! Comment vais-je oser parler devant tout ce monde ? Pourvu que le sale trac ne m’étrangle pas ! — D’abord, bien ensemble, nous plongeons dans nos jupes, en une belle révérence qui fait faire « fuiiiiii » à nos robes, et je commence, les oreilles tellement bourdonnantes que je ne m’entends pas :

Monsieur le Ministre,

Les enfants des écoles de Montigny, parés des fleurs de leur terre natale, viennent à vous, pleins de reconnaissance…