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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/334

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Après avoir déjeuné, je me relisse, je redresse les marguerites de ma couronne, je secoue la poussière de ma jupe de mousseline et j’attends patiemment deux heures, résistant de mon mieux à une forte envie de siester. Qu’il fera chaud là-bas, grand Dieu ! Fanchette, ne touche pas à ma jupe, c’est de la mousseline. Non, je ne te prends pas de mouches, tu ne vois donc pas que je reçois le Ministre ?

Je ressors ; les rues bourdonnent déjà et sonnent du bruit des pas qui, tous, descendent vers les écoles. On me regarde beaucoup, ça ne me déplaît pas. Presque toutes mes camarades sont déjà là quand j’arrive ; figures rouges, jupes de mousseline déjà froissées et aplaties, ça n’a plus le neuf de ce matin. Luce s’étire et bâille ; elle a déjeuné trop vite, elle a sommeil, elle a trop chaud, elle « se sent pousser des griffes ». Anaïs, seule, reste la même, aussi pâle, aussi froide, sans mollesse et sans émoi.

Ces demoiselles descendent enfin. Mlle Sergent, les joues cuites, gronde Aimée qui a taché le bas de sa jupe avec du jus de framboise ; la petite gâtée boude et remue les épaules, et se détourne sans vouloir voir la tendre prière des yeux de son amie. Luce guette tout cela, rage et se moque.

— Voyons, y êtes-vous toutes ? gronde Mademoiselle qui, comme toujours, fait éclater sur nos têtes innocentes ses rancunes personnelles.

— Tant pis, partons, je n’ai pas envie de faire