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Page:Coenobium - volume 4.1, 1910.djvu/14

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conduit à compléter leur vérité partielle par la vérité plus haute de l’expérience mystique. L’idée fondamentale de la gnoséologie de Soloviev est qu’à la base de toute connaissance, même de la plus scientifique et de la plus positive, se trouve un acte préalable de foi, et qu’il n’y a donc pas entre la connaissance et la foi cette antinomie qu’affirme la philosophie moderne. D’un autre côté la foi est connaissance. La théorie gnoséologique de l’expérience mystique n’a pas été suffisamment élaborée par Soloviev, mais elle constitue le germe de la philosophie russe dans son originalité propre ; de ce germe seulement la philosophie peut partir pour se développer davantage. L’enseignement de Soloviev a des points d’étroit contact avec celui de l’intuition intellectuelle de Schelling, mais il le dépasse. Soloviev tient compte du criticisme moderne, il reconnaît que l’empirisme contient une parcelle de vérité, et armé des connaissances et de la culture modernes, il réhabilite les doctrines des néo-platoniciens et des pères de l’Église. L’enseignement de Soloviev n’est pas seulement théosophique, mais aussi une philosophie : il s’était assimilé toute l’évolution philosophique du monde. Le théosophie passa par le creuset des doutes philosophiques et il défendit la foi chrétienne comme étant au plus haut degré raisonnable. Soloviev renforce l’idéalisme concret de sa profonde théorie de la distinction entre l’existence et l’Être vivant et concret. Hegel ne spécula que sur l’existence ; aussi ne sortit-il pas de l’abstrait. Mais l’existence doit avoir un substrat, doit être ce qui possède l’existence, c’est à dire l’Être vivant. Le substrat vivant de l’existence est l’idée suprême dans laquelle la philosophie cesse d’être abstraite et rationaliste.

Les idées de Soloviev ont été poursuivies par le plus remarquable de ses disciples, le prince Serge Troubetskoï. Celui-ci dans ses travaux d’histoire de la philosophie démontra la légitimité d’une métaphysique objective et nécessaire, considérée comme une révélation de la raison dans l’histoire ; pour lui l’histoire de la philosophie est le développement de la vérité et non une confusion d’erreurs. Il donne à l’idéalisme concret son plus lointain fondement en l’extrayant du fond même de l’idéalisme abstrait des allemands et est conduit à l’affirmation de l’universelle conscience et de l’universelle sensibilité.

Tchicherine, l’un des esprits les plus avancés de la Russie, juriste et philosophe, reste à l’écart de l’école de l’idéalisme concret. Il a défendu les droits de la métaphysique et la légitimité de la foi, mais il resta, plus qu’aucun autre philosophe russe, un rationaliste abstrait. Lui aussi sortit de Hegel, fut