Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/304

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invariablement bons, et qu’ils ont nécessairement horreur du crime.

— Voilà, ma chère lady, s’écria le comte, voilà ce que j’appelle d’admirables sentences ; et je me souviens de les avoir vues, tracées en bien beaux caractères, sur les cahiers d’écriture, à la première ligne de chaque page. Disant ces mots, il leva sur la paume de sa main, jusqu’à hauteur de visage, une de ses souris blanches, et l’interpellant par un de ces caprices qui lui sont familiers : — Ma jolie petite scélérate aux dehors candides, lui dit-il, profitez s’il vous plaît, de cette haute moralité. Une souris vraiment sage, vous l’avez entendu, est en même temps une souris vraiment bonne. Faites part de ceci à vos compagnes, je vous en supplie ; et qu’il ne vous arrive plus jamais de mordiller les barreaux de votre cage !

— Il est très-facile, reprit courageusement Laura, de ridiculiser toute chose au monde. Mais ce qui ne vous sera pas si aisé, comte Fosco, c’est de me signaler un homme sage qui ait été, en même temps, un grand criminel…

Le comte secoua ses massives épaules, et sourit à ma sœur le plus amicalement possible.

— Parfaitement vrai ! dit-il. Le crime de l’imbécile est celui qu’on découvre ; et le crime du sage est celui qu’on ne découvre pas. Si donc je m’avisais de citer un exemple, il ne saurait être celui d’un sage, et mon argument pécherait par la base. Décidément, chère lady Glyde, votre infaillible bon sens britannique l’emporte sur ma subtilité italienne. Cette fois, miss Halcombe, n’est-ce pas à mon tour d’être échec et mat ?

— À vos pièces, Laura ! dit en ricanant sir Percival, qui, de la porte, suivait ce petit débat. Dites-lui, maintenant, que « le crime lui-même fait découvrir le crime ». Encore une morale de maître d’écriture, qu’on va vous servir, Fosco !… Le crime faisant découvrir le crime. La bonne plaisanterie !

— Je crois que cela est vrai, dit Laura tranquillement.