Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/693

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et qu’ensuite on l’avait posté près de l’église, mais non en vue de la sacristie, afin qu’il pût venir prêter secours à son maître, dans le cas où, sorti de l’embuscade que l’on m’avait préparée, une lutte personnelle s’établirait entre sir Percival et moi. Peut-être est-il bon d’ajouter que le témoignage direct de cet homme n’est jamais venu corroborer ma manière de voir. Le rapport du médecin, à son sujet, déclarait sérieusement ébranlées les facultés mentales, d’ailleurs fort médiocres, dont le ciel l’avait pourvu ; on ne put rien tirer de lui à la reprise de l’enquête ; et je n’ai aucune raison de penser que, jusqu’à ce jour, il se soit jamais rétabli.

Je revins à l’hôtel de Welmingham, si fatigué de corps et d’esprit, si énervé, si accablé par tant d’épreuves successives, que j’étais absolument hors d’état de supporter le bavardage local dont l’enquête fournissait la matière, et de répondre aux insignifiantes questions qui m’étaient adressées par les causeurs de la « coffee-room. » Je quittai mon pauvre dîner pour me retirer dans mon galetas économique ; là, je trouvais un peu de repos ; là, je pouvais, tout à mon aise, rêver de Marian et de Laura.

Si j’eusse été plus riche, je serais retourné à Londres, et la vue de ces deux chers visages m’aurait certainement ranimé. Mais, d’une part, il fallait me tenir prêt à répondre si l’enquête ajournée réclamait mon témoignage, et j’étais encore bien autrement tenu de satisfaire à l’engagement, sous caution, contracté envers le magistrat de Knowlesbury. Nos minces ressources avaient déjà été entamées, et notre avenir incertain, — maintenant plus incertain que jamais, — m’interdisait toute dépense superflue, même celle d’un voyage à prix réduit, aller et retour, dans des voitures de seconde classe.

Le lendemain, — le jour qui suivit l’enquête, — j’avais la pleine disposition de moi-même. Je débutai, le matin, par aller chercher à la poste le bulletin régulier que m’adressait Marian. Il m’attendait là, comme le jour d’avant, et avait été rédigé d’un bout à l’autre avec une parfaite sérénité. Je le lus avec reconnaissance, et, l’esprit à l’aise pour vingt-quatre heures, j’allai au Vieux-Wel-