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Page:Collins - Le Secret.djvu/377

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Ces derniers mots jetèrent comme un flot de glace sur le cœur de Rosamond. Elle recula soudainement, avec un mouvement d’alarme… se maîtrisa, l’instant d’après, et s’inclina de nouveau vers l’oreiller. Mais il était trop tard : sa main, au moment où elle reculait, avait fait un mouvement brusque et saccadé… Sarah tressaillit, poussa un faible cri, et se réveilla les yeux agrandis par la terreur, une sueur abondante ruisselant sur son front.

« Mère ! s’écria Rosamond, la soulevant sur l’oreiller… Me voici revenue. Ne me reconnaissez-vous point ?

— Mère ? répéta Sarah d’une voix attristée et avec l’accent de l’interrogation… Mère ? »

Ce mot magique lui ayant été redit une seconde fois, le plaisir et la surprise rayonnèrent sur le visage de la malade, qui jeta ses deux bras autour du cou de sa fille :

« Oh ! ma Rosamond, dit-elle. Si j’avais pris la douce habitude de voir en face de moi, au moment de mon réveil, votre chère figure, je vous aurais bien plus tôt reconnue… en dépit de mon rêve… M’avez-vous réveillée, mon enfant, ou bien me suis-je réveillée de moi-même ?

— Je crains bien d’avoir à m’en accuser, mère.

— Ne parlez pas de « crainte, » mon enfant. Je me réveillerais avec joie du sommeil le plus doux que jamais femme ait goûté, pour voir votre charmante figure, et vous entendre me dire : « Maman. » D’ailleurs vous m’avez délivrée de la terreur où me tenait un de mes affreux rêves… Oh ! Rosamond, je suis convaincue que je vivrais heureuse de votre affection, si je pouvais seulement chasser de ma pensée les souvenirs de Porthgenna-Tower… oublier à jamais cette chambre où ma maîtresse est morte… et celle où j’avais caché la lettre…

— Essayez tout de suite, si vous m’en croyez… Parlons d’autres endroits où j’ai vécu… et où vous n’avez jamais passé… ou bien, chère mère, voulez-vous que je vous lise quelque chose ?… Avez-vous ici quelque livre qui vous plaise ? »

Elle regardait, en même temps, par-dessus le lit, sur la table qui était dans la ruelle ; sur cette table il n’y avait que quelques fioles de pharmacie, quelques-unes des fleurs de l’oncle Joseph dans un verre d’eau, et une petite boîte à ouvrage de forme oblongue. Elle regarda ensuite sur la commode placée derrière elle ; il n’y avait pas non plus le moindre volume sur ce meuble. Avant de se retourner du côté du lit,