Page:Conan - L'oublié, 1900.djvu/49

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
51
L’OUBLIÉ

Cela ne s’était jamais vu dans les nouveaux établissements, et cette préservation nous semblait un encouragement d’en haut. Mais, vers Noël, notre foi fut mise à une rude épreuve. Le fleuve commença à déborder. Personne n’avait prévu ce péril lorsqu’on avait choisi l’emplacement du fort, et l’inquiétude devint bientôt extrême. Songez-y ! nous allions nous trouver sans abri en plein hiver ; les provisions, les munitions allaient être gâtées ; nous allions être à la merci d’ennemis plus féroces que les bêtes des bois… M. de Maisonneuve fit faire une croix, la planta lui-même à quelque distance de la rivière, s’engageant par vœu, si l’inondation s’arrêtait, à la porter jusqu’au sommet de la montagne. L’eau continua de monter. Le 24 décembre, elle dépassa la croix… Ah ! ma chère enfant, quelle veille de Noël !… Jamais je n’ai vu rien de triste comme notre souper ce soir-là… Personne ne parlait, sauf M. de Maisonneuve, qui disait de temps à autre :