Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lady Henriette ; lady Laura était la femme de Denbigh : était-il possible qu’elles fussent devenues les confidentes des premières amours des hommes qu’elles aimaient ? Cette supposition était au moins singulière, et la veuve jeta un regard d’admiration et de pitié sur l’air de confiance et de bonheur de la jeune femme, qui se croyait si sûre de la tendresse de son mari.

Émilie était un peu embarrassée des prévenances des deux cousines, surtout de celles de lady Laura ; mais elles paraissaient être de si bonne foi, leur amabilité était si entraînante, que bientôt Émilie ne pensa plus qu’à répondre comme elle devait à leur bienveillance.

La conversation devint plusieurs fois embarrassante pour la famille du baronnet, et par moments bien pénible pour ses filles.

Vers la fin de la soirée ils s’étaient assis en cercle tous ensemble à quelque distance du reste de la société, et de manière à voir tout ce qui se passait dans le salon.

— Mon frère, dit lady Sarah Stapleton, dites-moi donc quelle est cette femme qui est assise auprès du colonel Egerton, et qui a un air si commun ?

— Ce n’est rien moins que lady Jarvis, la belle-mère de sir Henry Egerton et l’épouse de sir Timo, répondit le marquis avec un ton de gravité comique qui amusa beaucoup ses sœurs.

— Egerton est marié ! s’écria lord William ; quelle est la malheureuse qui lui a donné sa main ? C’est l’amoureux des onze mille vierges, et il se fait un jeu de tromper toutes les femmes. Toutes les richesses de l’Angleterre n’auraient pu me décider à lui laisser épouser une de mes sœurs.

— Ah ! pensa Mrs Wilson en entendant cette diatribe, combien nous pouvons être trompées sur le caractère d’un homme, quelques précautions que nous ayons pu prendre ; et que sont les travers connus d’Egerton près des vices cachés et de l’hypocrisie consommée de Denbigh !

La manière dont sir William venait de s’expliquer sur Egerton avait été bien pénible à quelques-uns de ses auditeurs, à qui elle avait rappelé de cruels souvenirs de devoirs négligés et d’affections déçues.

Sir Edward Moseley était disposé par caractère à juger toujours favorablement son prochain, et c’était autant par bonté d’âme et par philanthropie que par indolence qu’il avait pris si peu de peine